Concierge de la république
Voilà une question qui est essentielle, et quiconque suit la scène politique camerounaise — celle qui parle de changement — de prêt, sait un certain nombre de choses : la première c’est que l’espoir d’avoir « le Messie » a traverse tout le monde déçu par Fru Ndi, depuis au moins 2000, je dirai d’ailleurs concrètement depuis 2002. Indirectement, de manière subliminale, l’espoir s’était porté vers Celestin Monga, le présidentiable, du a sa lettre fameuse de 1990. La comparaison ne devrait pas étonner. La réaction épidémique du pouvoir devant tout ce que Kamto dit s’abattait alors sur Monga — il était donc vu autant par les journaux d’opposition qu’il finançait bien sûr, Le Messager, Le Jour, Mutations, que par le pouvoir, comme « l’homme de la situation. » « Il fait peur au régime » est le critère chez nous. Que d’espoirs ! Ils se sont réveillés encore plus avec l’élection de Ouattara à la présidence. Et dire que Monga ne s’en privait pas. Ce rôle de belle femme courtisée lui plaisait sans doute. Il en profitait pour se présenter comme l’intellectuel, comme « le grand intellectuel », comme on dit chez nous. Quand je lis ses analyses de ces jours-la, j’en ris vraiment, car elles sont répétitives, molles – son insistance sur l’habillement des gens est maladive, en fait, narcissique. L’aspect physique. Cela doit avoir une raison, ses raisons. Rappelez-vous pour comprendre ce que je dis ici, le désespoir public dans lequel nous étions, ses échanges avec Mbembe dans Le Messager, sur ceci, sur cela. Sur tout au fond, avec une arrogance qui aujourd’hui énerve enfin — « satrapie » est restée dans le jargon public —, car fondée dans l’inaction, ou la conviction que plus les mots sont durs, plus Biya fuira. La mort de Pius Njawe, et la claque que Monga y a reçue a sans doute clos le chapitre de ses manigances publiques, car depuis il s’est absolument tu.
La naissance du MRC, et de Maurice Kamto a de ce point été salutaire, car un chapitre a été ainsi clos structurellement. Le silence a en effet deux étages — il est de verbe et de structure. Le peuple — et ici je parle évidemment des Bamileke — qui voyait en Monga « le Messie », a tout simplement transporté ses rêves sur une autre personne, sur Maurice Kamto. Ils ont le même profil — ils sont des technocrates. Ils ne sont pas des politiques. Ils prennent la politique pour un jeu intellectuel. Monga était économiste, comme Kamto est juriste, tous les deux internationaux. Ils ont à peu près le même âge, mais ce qui les unit au fond, c’est ceux qui sont autour d’eux. Ce sont les mêmes gens, les Bamileke d’abord, en qui tous les deux ils ne se reconnaissent pas – même si Monga a tout de même participe a la naissance de l’université des Montagnes —, car ils se voient plutôt comme « Camerounais. » Ils sont en résumé ce que les Bamileke ont pu produire de plus beau, mais qui, en retour, crachent dans la sauce bamileke – je me rappelle littéralement ici le rire de Monga quand il lui fut demandé de participer a une tontine —, et laissent ceux-ci donc sans personne pour véritablement défendre leurs intérêts — pour ce qui est par exemple de ce qu’ils deviendraient, au cas de l’indépendance de l’Ambazonie, car ils seraient alors redevenus la minorité qu’ils furent entre 1956-1961, quand le génocide fut perpétré contre eux, ou du moins mis en branle. Ces genres de questions, évidemment ne sont pas d’importance pour ces deux, loin de la — ils ont ce qu’il y’a de commun aux aînés intermédiaires, ils sont fainéants par réflexe, mais surtout, ils ont fait du schibboleth un réflexe autant personnel que public. Que politique.
Devant l’incarcération de Kamto, celle de Monga et son procès sont soudain devenus bénins. La sortie de Monga aujourd’hui sur Twitter, ou il s’en prenait à des gens qui seraient devenus opposants par opportunisme, ne peut donc qu’être lue comme une claque publique a Kamto. Mais déjà il faut préciser un certain nombre de choses — Monga était et est du cercle restreint autour de Mongo Beti — d’où son hommage à Odile Tobner. Je ne crois pas que Kamto le soit. Leur schibboleth s’exprime donc de manière différente – chez Monga, par le fait de prendre Mongo Beti, qui est Bene, ou plus tard Achille Mbembe, Bassa, comme son porte-parole a lui, et il n’est pas seul en cela. Chez Kamto, son schibboleth se manifeste par le fait de transformer son parti, le MRC, en un parti qui au final exclue lui aussi sa propre base bamileke, qui la regarde par défaut, avec mépris donc. Kamto est, il faut préciser, Batchou, Monga est Zefa. C’est intéressant de voir le vitriol public de Monga tomber sur la personne qui organiquement dans l’opposition a pris sa place — et surtout quand on sait que cette personne est Bamileke. C’est intéressant de lire son desavouement de Kamto — qui a l’habitude de désavouer, par exemple de désavouer Fotso après sa mort, autant qu’il était désavoué par ce dernier avant la mort de ce dernier. Cette relation conflictuelle, ici entre deux aines intermédiaires, a un nom public chez nous, et c’est la jalousie. Pas la haine, car au fond, Monga a suffisamment de surface publique pour ne pas devoir cultiver sentiment aussi profondément négatif. La jalousie donc. Et chacun l’a lu comme tel, c’est-à-dire ceux-là, qui voyaient en Monga jusqu’en 2002 leur « Messie », et qui en 2012 ont reporté leurs sentiments identiques sur Kamto. Car les militants de Kamto sont ceux manqués de Monga. Je ne peux que sourire ici, car évidemment c’est intéressant de voir ce dialogue intratribal avoir lieu de manière aussi publique. Mais je me demande encore si ailleurs, les échanges sont aussi violents que chez les Bamileke. Monga n’a même pas endosse la candidature de Kamto aux présidentielles de 2018.
Ça dit tout.
Concierge de la république
Source: https://www.facebook.com
Vous devez vous connecter pour laisser un commentaire.