« Parlons d’Afrique » : échanges avec les diasporas africaines

… -Messieurs les présidents, mesdames et messieurs les ministres, chers invités, bonjour. Je vous en prie, asseyez-vous.

Je suis Elizabeth Tchoungui, journaliste, écrivaine franco-camerounaise, administratrice du Club XXIe siècle qui promeut la diversité et compte de nombreux professionnels de la diaspora parmi ses membres. Et j’ai l’honneur et le plaisir d’animer cette rencontre historique. Alors, ce n’est pas une envolée de lyrisme. Elle est historique car c’est une première. C’est la 1re fois qu’un président français convie la diaspora pour parler aux Français de l’importance de l’Afrique.

L’Afrique, ce continent majeur avec qui nous partageons un destin commun, que l’on le veuille ou non, et un continent où les diasporas de France ont un rôle majeur à jouer. Monsieur le président, je vous propose de prendre la parole pour accueillir comme il se doit votre homologue et nos invités.

-E. Macron : Merci beaucoup. Merci à vous, cher président.

(Applaudissements) Merci, Elizabeth. (…) Et bonjour à toutes et tous.

Mesdames, Messieurs les Ministres, Madame la secrétaire générale de l’OIF et chers amis. Merci d’être là. En effet, c’est un peu original et je veux vraiment remercier mon ami le président Nana d’être là avec nous et d’accepter de se prêter à ce jeu, parce qu’on a un peu des histoires croisées. Moi, j’ai commencé ma vie administrative en Afrique. Et j’ai coutume de dire dans une Afrique qui n’attend pas, parce que j’ai fait, donc, mon stage d’ambassade quand on est énarque, non pas dans les lieux les plus prestigieux où, normalement, on envoie les gens qui sont censés faire des grandes carrières, mais au Nigeria, qui était, je dois le dire, l’endroit où personne ne voulait aller.

J’y étais formidablement heureux et je dois beaucoup au Nigeria. Mais j’ai vu une Afrique qui n’attendait pas du tout la France, pas du tout l’Europe, qui avait envie de bouger, qui a profondément changé mon regard sur les choses. Et il se trouve que le président, quoique président d’un pays anglophone au milieu d’une grande région qui est passablement francophone, a commencé sa vie professionnelle en France en tant qu’avocat pendant 3 ou 4 ans, et il en a encore les marques puisqu’il parle un français parfait.

Et donc, moi, si j’ai voulu qu’on soit là tous ensemble, c’est parce qu’on essaie de construire, là aussi tous ensemble, et j’ai besoin de vous, pas simplement un nouveau regard, mais une nouvelle action sur et avec l’Afrique. La France et l’Afrique, c’est toute une histoire.

Et c’est une histoire qui, je dirais, nous dépasse. On peut dire qu’on est perchés au-dessus d’elle ou elle est sur nos épaules.

Elle a des pages glorieuses, elle a des pages aussi extraordinairement douloureuses. J’ai eu l’occasion de m’exprimer avec, je crois, beaucoup de clarté sur ce sujet. Mais je sais surtout que l’Afrique est un continent jeune, et moi, j’ai envie qu’on ouvre une nouvelle page.

Et donc avec le Conseil présidentiel pour l’Afrique, on a essayé de concevoir une nouvelle politique. Et je veux vraiment remercier les membres de ce Conseil présidentiel pour l’Afrique, parce que la décision qu’on a prise avec le ministre et mon équipe, c’est de dire : « C’est pas nous qui allons penser « la relation avec l’Afrique, la politique qu’on a à mener « avec l’Afrique, dans un bureau, de là où nous sommes.

« On va demander à des femmes et des hommes « qui vivent en France, bien souvent, sont binationaux « et ont une expérience, ont une vie de l’Afrique par leur destin propre, de nous aider à le penser. » Et donc, ce petit groupe m’accompagne depuis un peu plus de 2 ans et on a essayé de prendre un nouveau pli. Et ce nouveau pli, au fond, c’est de dire : la France doit penser, en quelque sorte, un nouveau pivot vers l’Afrique, c’est-à-dire, comment on repense la relation en s’appuyant sur la jeunesse, sur le fait que ce continent réinvente lui-même son destin et ne soit pas obligé d’être pris dans les rets de son propre passé, de notre propre passé, parce qu’il est jeune, parce que les nouvelles générations qui sont en train de faire l’Afrique, elles n’ont jamais connu les périodes coloniales ou ce qui a parfois été, ce qui a compliqué nos histoires, et parce qu’on peut repenser, forts, d’ailleurs, de cet imaginaire, avec ses pages sombres et avec, aussi, ce qui fait la créolisation parfois des cultures, les métissages qui se sont engagés, différemment les choses.

Et donc, on a engagé sur le plan économique, sur le plan culturel, sur le plan sportif, de nouveaux partenariats et une nouvelle façon de faire. Aussi en revenant sur des tabous. On est en train, on en parlera sans doute, de revenir sur un tabou : la zone CFA. J’espère qu’on y arrivera complètement. Revenir sur un tabou qui est le rapport à la langue.

La France, elle n’a pas à regarder uniquement l’Afrique francophone parce que, d’ailleurs, les pays qui parlent français en Afrique parlent aussi, souvent, beaucoup d’autres langues et sont en contact permanent avec les pays anglophones qui sont leurs voisins et réciproquement, et donc on doit bousculer aussi le tabou de la langue.

On a bousculé le tabou des oeuvres d’art, en rouvrant le sujet de la restitution. Le tabou du sport pour dire : il y a une vraie diplomatie par le sport et on doit pouvoir réussir, justement, à travailler avec la jeunesse, faire avec la jeunesse. Et au fond, ce qu’on a de proche en proche, depuis le discours d’Ouagadougou en novembre 2017..

. Quelques jours après, j’étais au Ghana aux côtés du président. Aux différentes étapes et jusqu’à aujourd’hui, c’est essayer d’inventer une nouvelle action en commun beaucoup plus équilibrée et de repenser la relation à travers cela entre l’Europe et l’Afrique. Et pas seulement d’ailleurs la France. Et de le penser par de nouveaux équilibres en travaillant beaucoup plus avec la jeunesse, en travaillant beaucoup plus avec la société civile, sur ses priorités, ses thèmes et de manière différente.

On en reparlera. Il y a aussi beaucoup de choses qui sont devant nous.

Avec, en particulier, la Saison Africa 2020, avec les sommets qu’on prépare, avec les nouvelles initiatives. Mais au fond, c’est cette conversion, si je puis dire, du regard réciproque qu’on est en train d’engager. Et dans ce contexte-là, les diasporas ont un rôle essentiel, pour plusieurs raisons.

D’abord, parce que je pense qu’on n’a pas assez travaillé avec nos propres diasporas et vu combien c’était une chance. Et quand on veut retravailler avec tous les pays d’Afrique et dire qu’on veut repenser ce partenariat, le refaire très différemment, ben, nos diasporas sont un formidable levier, parce qu’elles connaissent les codes, elles ont les accès et elles sont, en quelque sorte, nos meilleurs ambassadeurs et la meilleure façon sur le plan culturel, sur le plan économique, sur le plan sportif, sur le plan politique, de dire comment la France, l’Europe peuvent mieux travailler avec l’Afrique et développer ces liens nouveaux.

Et le faire avec des entrepreneurs, des femmes et des hommes de culture, de la société civile française dans toutes ses composantes. Et je crois que c’est très important pour nous, c’est très important pour nos entreprises qui sont ici présentes et sont engagées pleinement. Et je veux vraiment remercier.

.. Je vois Stéphane Richard qui est là et qui, avec Orange, a été formidable pour vraiment nous aider sur cette Saison Africa 2020. Ce qui montre aussi que, voilà, nos entreprises sont derrière. Je vois Sanofi qui est là aussi, avec Serge et plusieurs autres.

Donc je les remercie parce que c’est aussi un vrai changement du regard collectif et de cette implication.

Mais aussi parce que, par et avec nos diasporas, je veux qu’on puisse bâtir une véritable compréhension de ce qu’on est en train de faire en Afrique. Bien souvent, ce qu’on fait à l’étranger n’est pas compris dans notre propre pays. Et par cet échange, je veux aussi que les binationaux, les Français qui sont d’origine africaine, ceux qui constituent, celles et ceux qui constituent ces diasporas et les font vivre puissent comprendre, porter cette nouvelle stratégie qu’on a et, en quelque sorte, en être aussi les ambassadeurs dans notre pays.

Parce que moi, je pense que cette politique, ce partenariat nouveau, ce nouveau pivot qu’on pense avec l’Afrique, il est très important pour la France elle-même.

Et je terminerai là-dessus. Parce que notre pays a une part d’histoire en Afrique et nos concitoyens ont une part enracinée dans l’Afrique et dans cet imaginaire partagé. Qui est un imaginaire qui a d’ailleurs autant d’histoires que de relations avec ces pays. Et donc, moi, j’ai besoin que nos diasporas comprennent, endossent totalement ce changement, cette conversion du regard. D’abord, pour dire leur part de vérité sur et dans l’Afrique.

Et donc, par exemple, pour la Saison Africa 2020, je pense que c’est très important aussi que les diasporas jouent leur rôle plein et entier et portent ce regard. Mais qu’elles soient en quelque sorte aussi, si je puis dire, le ferment de ce qu’on est en train de faire, parce que je pense qu’il y a dans cette politique, au sens profond du terme, qu’on est en train de mener une partie de la solution à la réconciliation française.

Et je pense que si on n’arrive pas à changer et à réussir complètement cette conversion du regard avec l’Afrique, la France sera jamais réconciliée avec elle-même, parce qu’elle a une part d’Afrique en elle, parce qu’elle a une part d’Afrique en son sein, en son coeur. Et donc, on doit réussir aussi à penser, voilà, ce nouveau pivot que j’évoquais, ce rééquilibrage. Je ne veux pas être plus long, je l’ai déjà été trop.

Mais voilà un peu la philosophie que je voulais expliquer. C’est pour ça que, pour moi, le rendez-vous d’aujourd’hui, il est très important. Et c’est le début d’une série de rendez-vous qu’on doit avoir ensemble dans tous les territoires, et je sais et je vois nos parlementaires qui sont là aussi et qui portent avec beaucoup de force cela, parce qu’ils sont eux-mêmes issus, pour certains, de ces diasporas et pour d’autres, ce sont des passionnés de l’Afrique ou de l’investissement solidaire.

Et donc, c’est ça qu’on va continuer à faire ensemble. Merci, président, en tout cas, d’être là pour ce rendez-vous.

(Applaudissements) (…) -E. Tchoungui : Merci beaucoup.

Monsieur le président Nana Akufo-Addo, vous avez au moins 3 points en communs avec Emmanuel Macron : vous êtes président d’un grand pays, vous avez passé votre jeunesse en France et vous vous intéressez particulièrement aux diasporas de votre pays et vous les associez pour faire décoller le Ghana. -N. Akufo-Addo : Thank you very much. First of all, I want to thank the French president very much for the invitation to come here..

. -D’abord, je comprends tout à fait. Et je voudrais remercier le président français pour son invitation en France. Il est venu au Ghana, en novembre 2017, et ça a été une visite historique parce que c’était la 1re fois qu’un président français s’est rendu dans notre pays en visite depuis 62 ans.

Et donc, c’est vraiment quelque chose qui est important.

Et ce sera toujours là, ça ne partira jamais. Le seul, le 1er président français à avoir rendu visite à notre pays. Donc ceci, eh bien, c’est une visite réciproque pour le remercier. Et je voudrais vous remercier d’être venus nous écouter. C’est pas souvent que les hommes politiques ont un aussi bon auditoire et si nombreux.

Et donc je vous suis vraiment très reconnaissant pour cela. Ce qui nous amène aujourd’hui ici, eh bien, dit beaucoup sur le développement de notre pays en Afrique. Et je vais commencer par dire cela : le statut des gens de la diaspora, ce qu’ils font et ce qu’ils sont, eh bien, est tout à fait lié à ce qui se passe sur le continent. Un pays qui est fort et se développe bien, eh bien, transforme votre position ici.

Vous ne vivrez plus ce discours et cette histoire de pauvreté, de gens qui sont obligés de traverser le Sahara en mourant pour venir en Europe.

Ca n’est pas une histoire et un discours qui vous aidera ici. Non, notre principale tâche, c’est justement de confondre, de transformer notre continent. Et pourquoi je dis cela ? Eh bien, je vais vous donner un exemple, un seul. La diaspora chinoise, ça représente à peu près 16 millions de personnes, et dans le tableau des Etats concernés, eh bien, c’est une diaspora qui correspond au 25e rang dans le monde.

Eh bien, si l’on regarde les investissements qui ont été faits en Chine et qui ont permis aux Chinois de se transformer et à la Chine de devenir vraiment l’usine du monde, eh bien, c’est énorme, les investissements. Et cela a changé le statut et la position des Chinois, eh bien, dans le monde entier et de la diaspora chinoise aussi.

Donc c’est quelque chose que nous prenons très au sérieux, parce que, justement, c’est là le lien de transformation et c’est ce lien que je veux avoir avec la diaspora africaine. Comment vous impliquer dans le développement du continent ? Et je voudrais changer cette histoire.

Et lorsque nous changeons ce discours, et nous ne pouvons le faire… Il y a que nous qui puissions le faire. Eh bien, cette histoire que le père Noël va venir pour développer le continent, il y a que nous qui pouvons développer notre continent.

Il n’y a pas de père Noël. Une fois que cette mentalité devient notre mentalité, à savoir que nous devons, eh bien, développer notre pays nous-mêmes, cela change le regard. Nos relations avec la France, avec l’Europe ont changé. Notre relation avec l’Europe est totalement naturelle. Si vous regardez la carte, vous voyez bien que, géographiquement même, il n’y a qu’une petite bande d’eau qui nous sépare.

Et si vous regardez l’histoire aussi… L’histoire entre l’Europe et l’Afrique, il y a une relation, une alliance naturelle, une relation qui doit être différente de celle que nous avons eue jusqu’à ce jour. Pourquoi je dis cela ?

Eh bien, cette relation a enrichi l’Europe, mais n’a pas enrichi l’Afrique. Donc nous avons changé cette dynamique. Et on ne peut le faire qu’en prenant nous-mêmes les mesures adéquates pour notre avenir. (Applaudissements) Donc c’est la raison pour laquelle je mets l’accent justement sur cela. C’est pour ça que je suis tout à fait enthousiaste sur les possibilités que nous avons à l’avenir.

Nous pouvons tous commencer à parler la même langue : la langue de la coopération, de la collaboration, mais avec des fins, eh bien, différentes. Il ne peut pas être juste que ce continent ait les ressources les plus riches du monde et que ça soit le lieu des populations les plus pauvres du monde.

Cela ne va pas et nous devons changer cette relation. Et il faut que nous nous occupions de nous et que nous dépendions de nous-mêmes. Pour cela, ce qui est très important à reconnaître, c’est que nous avons les ressources, nous avons la population la plus jeune du monde.

25 % de notre population a moins de 19 ans et donc, c’est une force au potentiel énorme. Et nous devons trouver les moyens d’éduquer cette population de jeunes et leur donner les compétences qui fassent que l’Afrique devienne vraiment… Emprunte le chemin d’une croissance économique très forte.

Regardez l’Asie. Il est important d’avoir la bonne discipline et les bonnes mesures pour, eh bien, engager notre continent vers la croissance. Il y a des centaines de millions de Chinois et d’Indiens qui ont un énorme développement économique. Pourquoi est-ce que nous ne pouvons pas faire de même ? Et vous tous, ici, eh bien, vous pouvez faire et apporter une contribution considérable.

Il est très important que nous le reconnaissions. Je ne dis pas qu’il faut tourner notre dos au monde, pas du tout.

Nous sommes sur la même planète, nous avons besoin d’associations et de partenariats avec des pays comme la France. Nous devons, eh bien, bénéficier, apprendre de la technologie, du savoir-faire qui existent ici. Et nous devons toujours en bénéficier, mais bien comprendre que c’est à nous aussi de développer notre relation avec l’Europe et le reste du monde.

On ne doit pas être piégés dans un discours qui dit que nous sommes finalement dépendants des autres, des politiques des autres, des investissements des autres. Cela ne nous aidera pas. Monsieur le président, ce que nous disons, c’est qu’il est temps de prendre notre destinée en main. Cela fait 60 ans depuis l’indépendance des pays d’Afrique. Et nous sommes devenus indépendants avec l’idée que non seulement elle nous apportera de la liberté, des Etats souverains, mais aussi une transformation économique et sociale pour nos pays.

Et cela n’est pas advenu. Donc il y a plusieurs pays dans le continent qui, eh bien, seraient très… qui ne seraient pas très heureux de ce que je dis et je dois dire que j’aurais des difficultés si je commençais à citer des pays.

Mais, en tout cas, il est important qu’il y ait un certain nombre de pays qui soient dans le bon chemin pour faire ce que nous avons à faire. Donc merci de cette occasion qui m’est donnée de vous parler. Reconnaissons les responsabilités que nous avons, que chacun d’entre nous ont. Nous, les Africains, chez nous, enfin, au pays, mais vous ici. On peut faire beaucoup ensemble.

Voilà ce que je voulais dire. -Merci beaucoup, monsieur le président. (Applaudissements) Thank you. Voilà, le ton est donné, on va parler cash aujourd’hui. C’est le but.

Alors comment va se passer cet échange ? Sous forme de dialogue, de questions-réponses. Alors vous êtes très nombreux : entrepreneurs, membres d’associations, universitaires, personnalités médiatiques, donc tout le monde ne pourra pas poser de questions. C’est la règle du jeu. Je m’en excuse par avance.

Ce qu’il faut savoir, c’est que cette rencontre aujourd’hui fait écho à cette rencontre à Ouagadougou, à l’université Joseph Ki-Zerbo, lorsque vous êtes allé au Burkina Faso, monsieur le président Macron.

Et effectivement, la parole avait été très libre, le débat vif et on attend cela de vous aussi. Il faut savoir que cette rencontre, c’est aussi le fruit d’un long processus. C’est une idée du Conseil présidentiel pour l’Afrique qui, tout au long de ces derniers mois, a mené des ateliers à Tourcoing, à Reims, à Paris, à Bordeaux, en partenariat avec les Journées nationales des diasporas africaines, qui est le rendez-vous incontournable des diasporas. J’en profite pour saluer leur initiateur, Pierre de Gaétan Njikam, adjoint au maire de Bordeaux et co-président du comité de pilotage du sommet Afrique-France 2020.

Et donc, j’étais présente à la plupart de ces ateliers et des préoccupations et des idées communes sont remontées, ce qui nous a permis d’identifier les thématiques que je vous proposerai aujourd’hui pour nourrir vos questions. On parlera donc de normalisation et revalorisation de la relation avec l’Afrique, on parlera de la Saison culturelle Africa 2020 que vous avez annoncée, monsieur le président, lors de votre déplacement au Nigeria. Nous parlerons de visibilité et représentativité des diasporas, nous parlerons mobilité, nous parlerons migration, nous parlerons aide au public, au développement. Le principe, c’est que je prendrai des salves de 2 questions à la fois et je vous demanderai, ceux qui prendront la parole, des hôtesses seront à disposition pour vous donner le micro, d’être précis, synthétiques, pour que le maximum de personnes puissent prendre la parole. Et pour la 1re question, je vais déroger à la règle, mais ce sera l’unique cas, parce que nous avons voulu mettre en lumière le programme Young Leaders de la French-African Foundation, parce que voilà.

..

(Applaudissements) Ils sont venus en force. Comme vous pouvez le constater, voilà. Vous pouvez vous lever.

Voilà. Parce que ces jeunes que vous voyez en force incarnent cette génération appelée vraiment à construire ces nouveaux ponts, cette nouvelle passerelle entre l’Afrique et la France. Elle est d’ailleurs sous votre haut patronage, messieurs les présidents, cette 1re promotion. Et ensuite, ce sera un patronage africain tournant. Donc je vais donner la parole, pour cette 1re intervention, à Mlle Wande Abe.

Welcome. -Thank you. Bonjour, monsieur le président Macron. « Akwaaba », président Akufo-Addo. Moi, je suis Wande Abe.

Je viens du Nigeria, mais j’habite à Paris depuis 4 mois. Je travaille chez LVMH et avant, j’ai travaillé chez McKinsey et plusieurs pays en Afrique, au Nigeria, au Kenya, en Afrique du Sud et au Ghana. Pardon, j’apprends le français maintenant, je ne parle pas très bien, donc je vais poser la question en anglais. First of all, thank you..

. -Tout d’abord, merci de l’honneur merveilleux d’être ici cet après-midi et de vous parler. J’espère que vous aimerez mes 2 questions très précises.

Alors, monsieur Macron, j’ai une question pour vous. L’Afrique, c’est intéressant.

Ca devient vraiment le chouchou de l’avenir. Il y a des perspectives d’investissements, en particulier dans les pays anglophones, comme le Nigeria, qui ont eu des relations avec d’autres pays comme les Etats-Unis, d’autres pays de l’Union européenne et qui ont aussi des relations avec d’autres pays comme la Chine. Quel est l’intérêt compétitif ? Monsieur le président Akufo-Addo, il y a beaucoup de gens de la diaspora aujourd’hui qui, réellement, veulent contribuer à la construction de l’Afrique. Comment peut-on faire pour que ces personnes reviennent en Afrique ?

Je me souviens qu’il y avait des besoins d’investissements dans notre pays, dans les infrastructures, l’éducation, la santé. De manière concrète, qu’est-ce que l’on peut faire pour, eh bien, soutenir ces personnes lorsqu’elles rentrent en Afrique ? (Applaudissements) -N. Akufo-Addo : I didn’t get the name properly..

. -Je n’ai pas bien noté votre nom… Mlle Abe ?

Bien. Mademoiselle Abe, merci beaucoup.

Vous suivez manifestement ce qui se passe au Ghana. Cela ressort de votre question. Alors un certain nombre de choses d’un point de vue institutionnel et culturel sont en cours pour sceller véritablement les liens avec la diaspora du Ghana.

Nous avons maintenant des agences au sein du gouvernement, une agence dédiée dont la seule activité est de traiter avec la diaspora. Ils évaluent nos politiques gouvernementales et, à l’heure même où nous nous parlons, il y a un projet de loi sur la diaspora du Ghana.

Et je vais étudier ce projet de loi avant qu’il ne soit soumis au Parlement. Et le but, c’est précisément de traiter tous les aspects de l’engagement de la diaspora. Quelle est l’assistance que peut fournir le gouvernement à ceux qui reviennent au Ghana ?

Quid des investissements directs tels qu’on les appelle et comment impliquer également l’Etat et la communauté ghanéenne à l’étranger ? Alors l’étape suivante, c’est le gouvernement lui-même. Pour la 1re fois, un nombre significatif de membres de la diaspora participent au gouvernement ghanéen actuel.

Nous avons 16 ou 17 personnes qui proviennent de la diaspora ghanéenne qui travaillent maintenant au sein de notre administration depuis que j’ai pris mes fonctions il y a 2 ans. Et troisièmement, nous avons également identifié un certain nombre de domaines, des domaines politiques qui peuvent aider.

Notamment, quand on revient de l’étranger, bien souvent, on doit payer des taxes exorbitantes sur les biens qui sont apportés. Donc nous travaillons à tout cela, à supprimer notamment les taxes sur les véhicules que rapportent ces personnes avec elles. Et puis, il y a liens culturels. Alors, tous les 2 ans, nous avons ce sommet « retour à la maison ». Les 2 ans de mon mandat viennent d’avoir eu lieu.

Des gens, des Ghanéens du monde entier viennent au Ghana pour parler de ce qui se passe entre nous-mêmes et nos frères et soeurs présents à l’étranger. Donc il y a un certain nombre de choses qui sont faites et le plus important, c’est la participation constante de ces personnes à nos efforts d’ouverture, de sensibilisation.

Il y a à mon agenda des choses sur lesquelles je ne céderai jamais, ce sont les rendez-vous pris avec les Ghanéens à l’étranger car ils peuvent, ce faisant, lorsqu’ils me rencontrent, me faire un retour des sujets qui comptent pour eux, des difficultés qu’ils peuvent rencontrer. Donc cet aspect de la relation est très important. Et comme je l’ai dit pour commencer, il s’agit également de mieux sensibiliser quant au rôle qu’ils peuvent eux-mêmes jouer directement dans le développement du Ghana.

Donc voilà ce que je peux mettre sur la table, des choses concrètes que nous faisons. Merci. (Applaudissements) -E. Tchoungui : Les Ghanéens ont beaucoup de chance parce que, dans d’autres pays, la diaspora n’est pas forcément attendue et rencontre de nombreux obstacles. Je suis sûre qu’il y aura des témoignages à ce sujet.

Monsieur le président Macron, une réponse à Mlle Abe ? -E. Macron : Thank you, Miss Abe, for your question…

-Mlle Abe, s’agissant du Nigeria et de la situation, vous avez raison de dire que l’histoire est très différente.

Il y a une relation très particulière. Le Nigeria a essentiellement une histoire commune avec les Etats-Unis, le Royaume-Uni et puis la Chine. Je pense néanmoins que le Nigeria joue un rôle très spécifique et c’est la raison pour laquelle j’ai décidé de m’y concentrer. Tout d’abord, je pense absolument à ce succès africain.

J’y crois. Et comme mon ami le président Nana Akufo-Addo, je pense qu’il n’y a pas de père Noël et que le succès, la réussite de l’Afrique viendra de l’Afrique elle-même, de son peuple et de ses dirigeants. Et si vous regardez la situation, le Nigeria est l’un des…

C’est un peu l’éléphant dans la pièce ou l’un d’entre eux. C’est clair. Et si vous souhaitez construire la réussite de l’Afrique, pour l’Afrique, grâce à ses dirigeants, vous avez probablement besoin de mieux travailler sur l’intégration régionale et avec les différentes instances régionales. C’est la raison pour laquelle nous avons une série de relations bilatérales et nous en avons au demeurant parlé avec le président à l’occasion de notre déjeuner.

Je suis un fervent défenseur de la Cédéao, par exemple.

Et le Nigeria est un pays clé au sein de cette institution. Il est impossible de travailler avec cette région, avec l’Afrique, sans échanger avec le Nigeria. L’avantage compétitif tient à la taille du Nigeria. Si vous croyez en l’intégration régionale, il nous faut traiter avec le Nigeria. Le Nigeria, on peut le regarder de 2 façons.

Si le Nigeria échoue, il est impossible que la région réussisse. Si vous permettez, si on trouve une réussite pour le Nigeria, il portera toute la région. Deuxièmement, je crois que le Nigeria a de nombreux avantages compétitifs. Si vous regardez Telco, le système bancaire et la stratégie pour les énergies renouvelables, sur ces différentes verticales, il y a beaucoup à faire ensemble. Et au-delà de cette stratégie, en termes d’intégration régionale, nous pouvons faire quelque chose dans différents secteurs.

J’ajouterai que si vous croyez en ces liens culturels sur la façon de promouvoir ce qui est fort, ce qui se fait sur la scène culturelle en Afrique… Le Nigeria est si puissant. Quand je suis allé à Lagos, je me suis rendu au Shrine écouter tous ces artistes.

C’est un lieu décisif. Certains… Bien sûr, Nouakchott est également un grand lieu culturel, notamment pour le cinéma.

Mais je crois que le Nigeria a ce rôle très particulier à jouer dans le domaine de la culture, et ce rôle panafricain également pour la culture. Et tel est également l’un des avantages compétitifs du Nigeria. Enfin, je pense que…

N’ayez pas peur des avions qui passent, ce sont les répétitions des avions et des hélicoptères pour le défilé du 14-Juillet. Donc nous voulons travailler beaucoup plus encore avec le Nigeria sur la sécurité dans la région contre Boko Haram et tous les groupes terroristes. Et c’est là également que nous souhaiterions faire plus avec le Nigeria. Alors, il est vrai que, jusqu’à présent, le Nigeria n’était pas sur le radar de nombreux hommes politiques français, mais maintenant, nous croyons fermement à l’intégration régionale.

Il y a ces verticales clés pour le Nigeria, ce rôle très particulier également pour la sécurité dans la région.

Nous souhaiterions donc relancer les relations bilatérales et régionales avec le Nigeria. -E. Tchoungui : Merci beaucoup, monsieur le président. (Applaudissements) Alors, vous avez tous les deux insisté sur l’importance de changer de narratif. Et je pense qu’il y a une première salve de questions sur ces thématiques.

Donc qui souhaite…? Alors, Madame, devant.

.. Voilà pour l’hôtesse. Et puis Madame..

. Alors, 5e position au milieu. C’est peut-être…

Vous pouvez vous lever pour que les hôtesses vous repèrent ? Voilà. Je vais prendre vos 2 questions, madame. -Bonjour. Bonjour, monsieur le président.

Merci beaucoup pour l’invitation. Your Excellency, thank you for being here. Je m’appelle Aïssata Lam, Je viens de la Mauritanie.

Donc monsieur le président Macron, il y a 2 semaines, à Marseille, nous avions le Sommet des deux rives. On a beaucoup parlé de mobilité, mobilité des talents.

Et ma question s’adresse à vous, monsieur le président, mais également au président Akufo. Your Excellency, last year, I think… -M.

le président, l’année dernière, je crois que vous avez déclaré que 2019 devrait être l’année du retour, le retour de la diaspora sur le continent. Je souhaitais comprendre la rationalité de ce propos. Il y a bien sûr une rationalité évidente. L’Afrique a besoin de ses enfants pour le développement du continent, mais pour mieux comprendre, je sais que vous avez parlé de l’importance de la diaspora au sein de votre présidence, nous avons écouté aussi ce message vibrant sur les médias sociaux. Je ne suis pas ghanéenne, mais j’ai entendu.

M. le président, comment, justement, vous répondez à ce genre d’appel du président ghanéen qui veut que la diaspora rentre en Afrique ? Est-ce que, selon vous, c’est un échec, justement, de cette intégration sociale et économique de la diaspora en France ? Merci.

-Alors, une 2e question.

Et ensuite, vous répondrez. -Monsieur le président Macron, monsieur le président Akufo-Addo. Monsieur le président, il faut que je vous partage un sentiment que j’ai là. Je vis en France depuis 40 ans et c’est la 1re fois que j’ai la possibilité de marier mes 2 citoyennetés. Je suis une fière capverdienne et une fière française, et j’aimerais remercier les membres du CPA et vous, monsieur le président, pour avoir initié cette rencontre.

(Applaudissements) (…) La question que je voudrais vous poser est la suivante : je dirige la filiale d’un grand groupe américain en Afrique. Je dirige HP Afrique.

Et il n’y a pas une rencontre que je fasse en Afrique, que ce soit avec les institutions publiques ou privées, où, avant moi ou après moi, il n’y ait un Chinois ou un Américain. Vous avez évoqué notre histoire, vous avez évoqué notre passé.

D’un point de vue géographique et d’un point de vue historique, la France est le pays qui aurait dû garder cette grande avance sur le continent pour le meilleur et pour le pire. Et je parle du meilleur et du pire, car je pense que, finalement, ce couple franco-africain, c’est comme un couple où on s’aime, et puis, au fur et à mesure du temps, cet amour se détend parce que les uns et les autres ont leurs propres problèmes. Et puis, finalement, on n’a plus envie, parce que ça demande trop d’efforts.

Et la question que je me pose, c’est : qu’est-ce que vous allez faire que vos prédécesseurs n’ont pas fait pour relancer cette dynamique et pour faire en sorte que les Africains qui sont ici et qui sont fiers d’être à la fois français et africains retrouvent la fierté d’être franco-africains ? Merci.

(Applaudissements) (…

) -E. Macron : Merci pour vos 2 questions. Alors, sur votre 1er point. Moi, je ne pense pas du tout que ce soit un échec qu’il y ait cet appel et qu’il y ait cette volonté. D’abord parce que le président l’a dit, enfin, il l’expliquera beaucoup mieux que moi, et moi, c’est aussi pour ça que je voulais qu’il soit là aujourd’hui parce qu’il porte la vérité de ce discours et un discours, moi, que j’ai toujours écouté, entendu, qui est celui d’une ambition et d’une fierté, justement, africaine et qui, pour moi, est très important.

Et ça n’a pas du tout la même force quand c’est le président du Ghana qui le dit et quand c’est le président de la France. Et c’est très bien comme ça. Moi, je pense qu’il y a des échecs d’intégration. On les connaît. On y reviendra sans doute dans la discussion.

Bien sûr qu’ils sont le fruit des décennies passées. Mais je vois aussi de la part de nombreux pays africains l’affaiblissement qu’est la fuite des cerveaux, des talents, des familles. Et donc, je me place du point de vue du président du Ghana. Mais comme beaucoup de présidents de différents pays, leur diaspora est une richesse non utilisée, parce que ce sont des femmes et des hommes qui ont été se former, ont accumulé une expérience à travers le monde, une connaissance, et se disent que s’ils reviennent la donner au pays, en tout cas, lui apporter cette part, ça peut être un booster formidable. Donc je dirais qu’il peut y avoir des gens qui répondent à cet appel en disant : « Moi, je suis mal dans l’endroit « où j’ai atterri, que ce soit en France ou ailleurs, et j’y retourne.

 » A ce moment-là, c’est un échec.

Mais il y a aussi des gens qui peuvent être très bien là où ils sont et qui peuvent se dire : « J’ai envie, dans une nouvelle partie de ma vie, de retrouver mes racines ou d’aller refaire une partie de ma vie en Afrique. » Et ça, je trouve ça formidablement bien. Au fond, moi, ce qui m’importe, on reviendra sans doute beaucoup sur le sujet des mobilités ou des migrations, c’est que ce soit choisi et pas subi. C’est ça, la clé.

Notre monde est fait et sera de plus en plus fait de mobilité. Les mobilités qu’on doit combattre, ce sont les mobilités subies. Ce sont les mobilités de la misère, ce sont les routes de la mort, des trafics ou du ressentiment. Mais qu’il y ait des femmes et des hommes qui aient passé des années, des décennies dans des pays d’Europe ou des Etats-Unis ou d’ailleurs et qui, à un moment, se disent : « Ca a du sens pour moi, de la force pour moi, « peut-être des opportunités nouvelles de retourner dans mon pays d’origine ou celui de mes parents », moi, je trouve ça formidable.

Je trouve que c’est formidable aussi, et c’est le lien avec la 2e question, parce que nous avons destin lié.

Il y a une chose qu’on ne peut pas enlever à la France et à l’Europe et qui nous différencie très profondément des Etats-Unis ou de la Chine, c’est que si l’Afrique échoue, l’Europe ne peut pas réussir. Il suffit de regarder la carte du monde. C’est pas possible, parce que si l’Afrique échoue, tous ceux qui ne réussissent pas dans leur pays ou sur le continent africain viendront dans le continent européen.

On aura à ce moment-là des tensions, on va rentrer dans des folies géopolitiques complètes que, parfois, certains essaient déjà de nous faire vivre. Donc le destin européen est lié au destin africain aujourd’hui.

Et quand je regarde où est la dynamique démographique dans cet ensemble, la jeunesse africaine, il faut qu’on lui bâtisse un avenir en Afrique. C’est évident. Et donc, la possibilité d’avoir ces retours, d’avoir une diaspora qui vienne enrichir ces pays d’origine pour faire réussir ces derniers, pour moi, c’est un message qui est non seulement parfaitement audible, mais qui est, à mes yeux, un des leviers sur lesquels on doit jouer en construisant ces allers-retours, cette mobilité choisie, que ce soit d’ailleurs pour les étudiants, que ce soit pour les entrepreneurs, que ce soit pour les hommes et les femmes de culture. Et au fond, pour aller au bout de votre 2e question, moi, je pense que quand vous croisez dans les couloirs des Chinois ou des Américains, ça vous montre une chose, c’est que l’Afrique est devenue, pour beaucoup d’entreprises, une terre d’opportunités et donc de concurrence. Bon signal pour l’Afrique.

2e chose, je pense que vous avez toujours un argument à faire valoir. Nous, on ne peut pas réussir sans vous, comme je le disais. C’est la différence avec les autres. Et c’est aussi pour ça que nous, on peut bâtir des vrais partenariats. Et c’est ce qu’on doit réussir à faire sur le plan économique, ce que par le passé nous n’avions pas fait.

On a bâti dans les modèles passés des développements économiques qui n’étaient pas équilibrés, où on allait parfois exploiter les matières premières, où on allait, nous, faire du chiffre en Afrique sans permettre à la classe moyenne africaine de se développer, sans permettre l’éducation en Afrique et, en quelque sorte, aux cerveaux de se former et de rester sur place.

Ce qu’on est en train de faire par notre politique universitaire, notre politique culturelle, notre politique, justement, là aussi, de développement économique avec l’Afrique, en lien avec ce qu’on fait en termes d’investissements solidaires en Afrique, pour reprendre la formule d’Hervé Berville, et de ce qu’on est en train de mettre en place avec l’AFD, c’est un partenariat équilibré. Et ça, je pense que c’est un vrai argument qu’on a et je pense que cette reconquête de l’Afrique, elle passe par la reconquête des coeurs. Et c’est pas de se sentir, justement, en concurrence de prédation avec d’autres. C’est de dire qu’on a à bâtir ensemble une réussite qui est la nôtre.

Qui est la nôtre. Et donc d’être dans un partenariat beaucoup plus respectueux et équilibré où chacun trouve sa part et où, donc, on aide à former, c’est ce qu’on évoquait tout à l’heure ensemble, à développer l’entrepreneuriat dans le pays africain, un écosystème, à avoir des investissements qui sont beaucoup plus équilibrés. Ca, c’est…

Moi, la stratégie que je veux qu’on conduise, c’est celle-ci.

C’est tout à fait vrai quand je regarde les 15 dernières années, la France et l’Europe ont décroché. Et la France plus particulièrement que d’autres parce qu’on avait une position historique. Mais je pense que ça va nous conduire à un réveil qui est de repenser nos méthodes, de repenser notre approche et d’avoir cette approche par la culture, par les relations personnelles, par l’éducation, par l’entreprise, pour rebâtir notre présence de manière beaucoup plus équilibrée et partenariale. Et puis, je pense que c’est par là qu’on rebâtit la fierté.

C’est pour ça que vous êtes là aujourd’hui. Et je dirais que la réponse à votre 2e question, vous l’avez apportée par votre remarque introductive.

Moi, je veux qu’on change dans notre pays la relation avec ses origines plurielles et qu’une Franco-Capverdienne puisse dire : « Je revendique ces identités parce que je suis française. « Mais on ne me demande pas, pour être Française, de renoncer « à ce que je suis aussi de par mes parents et/ou ma naissance, c’est-à-dire mon attachement au Cap-Vert. » C’est ça, ce qu’on doit faire.

Et c’est comme ça qu’on rebâtit la fierté.

La fierté de nos diasporas, la fierté de nos binationaux, la fierté des Français d’origine africaine. Et je vois pas d’autre chemin. Or je pense que nous étions restés dans une vision qui était passéiste et, en quelque sorte, nous avions construit des blocages intérieurs où on ne voulait pas voir cela, où on avait, en quelque sorte, l’Afrique arrogante en Afrique et l’Afrique honteuse en France. Je préfère qu’on ait l’Afrique fière des deux côtés.

Je pense que ça marche mieux. -E. Tchoungui : Merci. (Applaudissements) (..

.) -Monsieur le président Akufo-Addo, réponse à la question de Madame. -N. Akufo-Addo : So, my lady from Mauritania..

. -A la question posée par Madame, de Mauritanie, l’année du retour.

1690…

1619, l’arrivée des 1ers Africains enchaînés en Virginie, le début du commerce des esclaves. 400 ans et nous avons décidé au Ghana qu’il nous fallait trouver un moyen de commémorer cette année. Tout d’abord, il est quasiment certain que ces personnes étaient toutes ghanéennes. Elles sont parties des côtes du Ghana. Et nous commémorons leur départ de 2 façons.

Tout d’abord, les déclarations sont adressées à la diaspora ainsi qu’aux Africains, aux Africains restés en Afrique. Et il y a ce message : plus jamais, plus jamais une telle tragédie pour l’Afrique. Disons-le aux Africains avant toute chose. Et puis, il y a un certain nombre d’Européens, il y a une technologie qui peut nous être apportée également.

Il y a un incroyable réseau de part et d’autre de l’Atlantique.

Leur travail a été utilisé. Le travail de ces esclaves, initialement, des 1ers arrivés, ils n’en ont rien perçu, rien reçu en retour. C’est le 1er appel que nous lançons. Nous ne permettrons jamais que cela se reproduise. Les leçons qu’il nous faut retenir résultent de cette situation.

Ce sont des leçons qu’il nous faut prendre très au sérieux. Deuxièmement, utilisons cela comme une plateforme pour renforcer la relation entre nous-mêmes et la diaspora.

Voilà ce qui sous-tend ce discours, car cette relation nous est est extrêmement précieuse. Je me suis rendu aux Etats-Unis et dans les pays des Caraïbes récemment pour aller diffuser ce message. Et l’opportunité nous est donnée d’avoir une nouvelle relation grâce à ces commémorations.

Utilisons cet anniversaire pour la construire. Il y a de nombreux avantages pour nous. La qualité des personnes ici présentes en témoigne. Le développement de l’Afrique, nous essayons de le construire chez nous et aussi grâce à vous. Nous sensibilisons également mieux les gens.

Qui sommes-nous ? Où sommes-nous dans le monde ? Quelle est notre place ? Faire en sorte que ces blocages, ces pages noires de notre histoire ne se reproduisent jamais. Il faut qu’il y ait une résonance de cette histoire, qu’elle soit entendue par vous, par la diaspora, et que le lien véritablement perdure entre vous et nous en Afrique.

Permettez-moi de dire quelques mots en complément de ce qu’a dit le président Macron, en réponse à la question posée par Madame, du Cap-Vert. Il est clair que les possibilités sur notre continent sont telles que de nombreuses personnes, avec des profils très différents, sont attirées par l’Afrique. Les minéraux : 30 % des minéraux, des ressources minérales sont en Afrique. Tous les minéraux dont vous avez besoin pour une société industrielle sont en Afrique.

30 % des minéraux qui restent dans le monde sont sur notre continent.

Et nous avons donc des ressources, une combinaison de ressources qui présente un grand intérêt pour tous. Ce qui est très important pour nous, c’est que nous créions aussi les conditions chez nous pour l’exploitation de ces ressources, pour que ce ne soit pas à sens unique. Nous n’allons pas simplement rester assis et permettre que l’on emporte ces ressources, que ce soit la Chine, les Etats-Unis, la France qui prennent ces matières 1res brutes et que nous restions tout en bas de la chaîne de valeur. Je vais vous donner un petit exemple qui concerne le Ghana pour renforcer mon propos. Entre le Ghana et la Côte d’Ivoire, nous représentons quelque 65 % de la production de cacao, de la production mondiale.

Les industries chocolatières de par le monde, par an, représentent une valeur de 100 milliards ou plus de 100 milliards de dollars américains.

C’est la valeur de l’industrie qui repose sur le cacao. Les agriculteurs qui fournissent la matière première, les fèves de cacao, gagnent en moyenne 6 millions…

6,5 milliards par an. Donc ce qui se passe de par le monde doit avoir un sens pour nous. Il faut que nous recevions une grande part de la valeur ajoutée de nos matières premières. Et c’est pour ça qu’il faut que le cacao soit transformé en chocolat au Ghana. Il faut que nous ayons les compétences, il faut que nous ayons les capacités.

Vous imaginez bien quelle différence cela ferait pour nos agriculteurs, les revenus pour notre nation et le potentiel qui en résulterait en termes de revenus pour le développement de notre pays. Donc le président Macron, bien entendu, souhaiterait savoir ce qui peut revenir à la France, quelle part de cette industrie. C’est son rôle en tant que président français, chacun le sien.

Mais notre devoir est de faire en sorte que, peu importe avec qui nous travaillons, l’engagement soit beaucoup plus profitable pour le Ghana qu’il ne l’a été par le passé. Et ça, tout dépend du type de politiques et de mesures que nous mettons en place pour protéger nos ressources et notre avenir.

Merci. -E. Tchoungui : Thank you very much. (Applaudissements) Le président Macron a évoqué tout à l’heure la culture comme un levier très important pour changer le narratif, d’où la Saison Africa 2020 qui est importante pour faire bouger les lignes et changer les perceptions autour de l’Afrique. Je pense qu’on est tous conscients ici qu’il y a beaucoup de boulot.

Je vous donne juste un exemple, quand mon fils, au CP, explique à un de ses copains qu’il va partir en vacances dans son autre pays, le Cameroun, la réponse de son copain, c’est : « Oh là là, pas de chance. Mon père dit que l’Afrique, c’est nul. » Donc voilà, nous partons de là.

Donc beaucoup d’attentes autour de cette saison culturelle. Qui souhaite poser des questions ?

Alors, nous allons… Beaucoup de mains se lèvent. Madame en chemise rayée.

Voilà. Ici. Et puis, ensuite, Mademoiselle en jaune. -Bonjour, messieurs les présidents. Monsieur le président Akufo, monsieur le président Emmanuel Macron.

Vous avez parlé d’histoire. Alors moi, je m’appelle Aïssata Seck. Je suis maire-adjointe à Bondy, en charge des politiques mémorielles. Je travaille également avec Jean-Marc Ayrault sur la préfiguration de la future Fondation pour la mémoire de l’esclavage, des traites et de leurs abolitions.

Vous en avez a longuement parlé lors de votre discours, le 10 mai.

Et j’ai été porteuse du dossier sur la naturalisation des tirailleurs sénégalais en 2017 par le président de la République. Donc voilà. Aujourd’hui, je voulais vous parler d’une chose qui nous touche, un certain nombre de personnalités, mais pas que. J’ose espérer que vos conseillers vous ont transmis la tribune qui est parue dans « Le Monde » cette semaine sur le 75e anniversaire du débarquement de Provence oublié.

Je ne vais pas vous faire un rappel historique à vous parce que j’ose imaginer que vous connaissez votre histoire.

Mais pour les personnes qui ne connaissent pas cette histoire, le débarquement de Provence, c’est 235 000 combattants français, dont 90 % issus des troupes coloniales venues du Sénégal, venues d’Algérie, venues du Maroc, du Pacifique, des Antilles. Aujourd’hui, avec 22 autres personnalités, dont certains sont dans la salle, je ne vais citer que M. Blanchard, Lilian Thuram, M. Galvani, nous déplorons que les commémorations nationales ne soient pas à la hauteur des enjeux mémoriels de notre pays. Les enjeux mémoriels de notre pays.

.. C’est-à-dire que ces combattants, qui ont combattu pour la France, qui ont libéré la Provence font qu’aujourd’hui, vous et moi, nous puissions nous parler, vous et moi, nous puissions nous retrouver en face et parler de cette France diverse, variée et libre. Que comptez-vous faire pour ce 75e anniversaire du débarquement de Provence ? Sachant qu’il y a 2 mois, nous avons commémoré comme il se fallait, le 6 juin, le débarquement de Normandie.

Merci. -E. Tchoungui : Merci. (Applaudissements) Madame en jaune. (.

..) -Bonjour. Je me présente, Gloria Fataki. Messieurs les présidents, monsieur Macron.

.. And your Excellency Akufo. Donc je suis membre du secrétariat général du Youth7, donc c’est le groupe d’engagement des jeunes du G7 et également ancienne VIE, donc volontariat international en entreprise. On a beaucoup parlé, en fait, des jeunes de la diaspora qui souhaitent rentrer en Afrique pour oeuvrer pour l’Afrique.

Et j’aimerais savoir, pour ceux qui souhaitent rester, quelles sont les mesures qui sont prises par rapport aux discriminations qui peuvent avoir lieu au sein de leurs entreprises, au sein de différentes administrations. Quelles sont les mesures que vous comptez prendre pour ces jeunes-là qui souhaitent rester et qui souhaitent évoluer en France et avoir des carrières, des vraies évolutions et non des plafonds de verre ? Aujourd’hui, là, nous avons dans la salle Mme Elisabeth Moreno, qui est VP Afrique de HP.

C’est un exemple pour nous et il y a plein d’autres femmes qui sont des exemples pour nous dans cette salle. Mais la question est : comment on évolue dans ce monde, enfin, dans ce pays ?

Parce que parfois, j’ai pensé à quitter la France, donc j’aimerais bien y rester. Donc quelles sont les solutions pour nous ? Merci. (Applaudissements) (..

.) -E. Macron : Merci beaucoup. Sur la 1re question mémorielle, je veux d’abord vous rassurer. Le débarquement de Provence et toutes les composantes de ce débarquement seront dûment célébrés au mois d’août.

Et donc je présiderai moi-même 2 célébrations. (Applaudissements) Et comme je l’ai d’ailleurs à chaque fois fait. Pour la Première Guerre mondiale, l’armée noire a sa part aussi. Nous avons fêté à Reims..

. J’avais invité le président Keïta du Mali, qui était là, Alain Mabanckou avait lu un texte magnifique… Et donc nous avons, j’ai toujours eu à coeur, justement, qu’il y ait cette part de l’histoire française et du sacrifice.

..

Vous évoquiez les tirailleurs sénégalais, mais l’armée noire, durant la Première Guerre mondiale, en effet, les combattants d’Afrique lors du débarquement en Provence font partie de cette mémoire, de notre histoire et de celles et ceux qui ont donné leur vie, parfois pour des territoires qu’ils n’avaient jamais foulé avant, jamais foulé avant. Et en n’étant pendant très longtemps jamais non plus reconnus. Donc je veux pleinement vous rassurer, et j’avais bien entendu lu la tribune, mais vous rassurer aussi sur le fait qu’il y aura plein hommage qui sera rendu à ces combattants lorsque nous ferons les cérémonies pour le débarquement de Provence.

Mais vous avez raison de les porter. Et je pense que tout ça montre aussi à quel point, pour beaucoup de nos concitoyens, cette histoire est enchevêtrée, avec des composantes qui, pour beaucoup de nos concitoyens, ne sont pas toujours, d’ailleurs, connues, sues.

Moi, j’ai été frappé de voir, quand on a fêté, enfin, « fêté », célébré, pardon, ce qu’était l’armée noire et ce qu’elle a…

ce en quoi elle a compté, à quel point elle a compté sur le front, durant la Première Guerre mondiale, que beaucoup de nos jeunes, de scolaires le découvraient. Et donc cela montre toute l’importance du travail que la fondation à laquelle vous travaillez avec Jean-Marc Ayrault et toute l’équipe, eh bien, conduit un travail essentiel, le travail que poursuivent les historiens, et je salue les historiens présents dans cette salle et qui oeuvrent à vos côtés ou qui oeuvrent par leur travail académique propre. Mais il y a le travail de recherche qui doit continuer, de publication.

Il y a le travail qu’on doit faire à travers les moments, justement, de commémorations et de célébrations. Mais il y a le travail aussi qu’on doit faire dans les programmes scolaires et qui doit se poursuivre parce qu’on n’est pas au bout de celui-ci.

Et ces parts de notre histoire ne sont pas toutes parfaitement intégrées à nos programmes scolaires. Et c’est un des points qu’on a discuté avec la fondation en particulier. Pour votre 2e question, alors, vous avez raison. On va continuer à développer malgré tous ces programmes de VIE auxquels nous sommes très attachés et auxquels vous participez.

Vous savez, ce que vous dites et ce plafond de verre que vous soulignez, beaucoup l’ont vécu dans cette salle, le vivent peut-être encore et donc je vais pas vous faire des promesses en disant : « Ca va se supprimer comme ça.

 » 1er point, ce qu’on est en train de faire aujourd’hui, je pense, peut beaucoup le supprimer. C’est-à-dire, des jeunes femmes comme vous sont des opportunités pour les entreprises. Une entreprise qui ne sait pas intégrer la diversité de profils, la diversité, justement, d’origines, de parcours, c’est une entreprise qui est condamnée à mourir. Je pense que les chefs d’entreprises qui sont là le savent bien. Et il en est de même pour l’administration.

De même. Et donc, c’est simplement… On n’a pas mis en place une politique de discrimination positive, parce que la République, moi, je crois plutôt dans ses termes, dans sa manière de faire.

Je crois simplement à l’égalité réelle, effective, qui, aujourd’hui, n’a pas lieu mais qui suppose là aussi une conversion des esprits. Donc 1, faire la pédagogie forte, à travers des visages, des exemples, des modèles, que c’est une opportunité pour les entreprises.

Des jeunes femmes comme vous et des femmes avec des profils, ou des hommes, avec des profils très différents, mais qui apportent des cultures plurielles et la possibilité, justement, d’apporter cet enrichissement à l’entreprise. 2e point, c’est de lutter contre les pratiques de discrimination qui continuent à exister. C’est pour ça qu’on a systématisé, avec la ministre du Travail, les tests à l’aveugle pour, à l’embauche, mais aussi dans les promotions, lutter contre les 2 grandes discriminations qui continuent à exister dans notre pays : la discrimination entre les femmes et les hommes, celle-ci, elle est plus dans les promotions ou les inégalités salariales, mais surtout les discriminations à l’embauche.

Et donc, ça avait été commencé de manière expérimentale sous la mandature précédente. On est en train de le systématiser pour là aussi lutter contre les entreprises qui font ça. Et puis 3e point, moi, je crois très profondément, pardon de cet anglicisme, mais au rôle modèle. Et donc, je pense qu’on y viendra aussi, à la visibilité qu’on donne aux modèles et aux trajectoires comme les vôtres, comme la trajectoire de Madame, c’est-à-dire de montrer qu’il y a des réussites républicaines, dans la République, parmi les élus, parmi les membres de la haute administration, dans le personnel politique ou entrepreneurial qui montrent que c’est possible et qui permettent là aussi de lutter contre les pires barrières qui sont dans les esprits. D’abord, les barrières qu’il y a dans l’esprit des jeunes filles ou des jeunes garçons de la diaspora qui viennent d’arriver en France ou qui sont parfois d’origine africaine.

« Parlons d'Afrique » : échanges avec les diasporas africaines

Parce que la pire des choses, c’est de se dire : « C’est pas fait pour moi, parce que c’est pas possible. Tout le monde m’empêchera. » Quand il y a des modèles qui existent, les choses changent dans la tête. Et puis de casser aussi ces barrières dans la tête, encore une fois, des employeurs et de ceux qui donnent des responsabilités. Je pense que donner une responsabilité audiovisuelle à une journaliste comme vous, ça fait pas de mal aux chaînes qui l’ont fait, et ça permet aussi de porter un autre visage et d’en entraîner d’autres.

Il n’y en a pas assez dans l’audiovisuel français aujourd’hui.

Force est de le constater. De permettre d’avoir dans des entreprises françaises des profils, en l’espèce, c’est une entreprise qui a son site en France, mais même si elle était anglo-saxonne, comme vous, madame, ou dans d’autres entreprises, comme le font les entreprises ici présentes, c’est, je pense, quelque chose qui change. J’ai choisi que la porte-parole du gouvernement soit franco-sénégalaise. Je pense que ça change quelque chose dans les esprits.

Sibeth, qui m’accompagnait depuis des années… (Applaudissements) (..

.) Mais avec un point, je vais être clair. Elle est pas devenue porte-parole du gouvernement parce qu’elle était d’origine sénégalaise, c’est parce que c’était la meilleure pour le faire. Mais ce n’est pas parce qu’elle était franco-sénégalaise que ça devait être un handicap pour devenir porte-parole du gouvernement, même si elle a eu à essuyer beaucoup de critiques parce qu’elle était franco-sénégalaise. Mais donc c’est ça, c’est par l’exemple.

Et je le dis parce que celles et ceux qui portent ces réussites, et elle le sait bien, je dirais, ont une responsabilité encore accrue, c’est que les autres, plus jeunes, les regardent comme des modèles et comme des voies d’eau qui ont été ouvertes, des exemples à suivre. Et c’est comme ça.

Mais moi, je pense que c’est cette génération, la nôtre, c’est ça qu’elle va changer, c’est ça qu’elle doit changer par des mesures contraignantes, par des mesures, parfois, où on bouscule un peu les employeurs, où on sanctionne, où on pénalise, où on dénonce, mais aussi par des formidables exemples qu’on va créer. Et moi, je pense que la génération dont on parle, c’est celle qui va faire décoller l’Afrique, comme le disait le président du Ghana, et c’est celle qui va permettre de changer ce regard en France et de permettre à des binationaux, à des Français d’origine africaine, à, parfois, des Africains vivant en France mais n’étant pas Français, de réussir dans notre paysage audiovisuel, dans nos entreprises, dans notre administration, dans notre personnel politique.

-E.

Tchoungui : Merci beaucoup. (Applaudissements) -Monsieur le président Akufo-Addo, est-ce que la diaspora ghanéenne, qui est très nombreuse aux Etats-Unis, en Angleterre, est confrontée également à ce plafond de verre qui, parfois, vu de France, paraît très français ? Est-ce qu’ils vous font part de difficultés particulières ? -N. Akufo-Addo : They make more or less the same complaints.

-En tout cas, ils se plaignent de la même manière. Ils ont des difficultés en ce qui concerne les opportunités, l’accès et la structure des sociétés occidentales. Eh bien, ils sont quand même tous sur le même modèle. J’ai pas l’impression qu’il y ait un cas particulier pour la France. -E.

Tchoungui : On va continuer, on va revenir évidemment sur la Saison Africa 2020, mais pour poursuivre sur cette question de la visibilité dans l’espace public, on est tous d’accord ici pour se dire que pour être utiles à l’Afrique et être ses ponts, il faut déjà qu’on ait une visibilité dans l’espace public français.

Je pense qu’il y a des questions sur ce sujet. Donc oui, beaucoup de questions. Donc monsieur..

. Je reconnais un confrère. Monsieur, levez-vous. Avec la chemise. Voilà.

Et puis, ensuite, Madame avec le turban. -Bonjour. Bonjour à tous. Bonjour aux deux chefs d’Etat. C’est effectivement exceptionnel.

Je me présente d’abord, je m’appelle Amobé Mévégué, je suis producteur audiovisuel depuis longtemps sur les chaînes de télévisions internationales du service public, RFI, France24 et tant d’autres. Des chaînes privées également. J’ai eu la chance de faire un parcours depuis la France pour impacter une portion de la citoyenneté la plus difficilement joignable, c’est-à-dire la jeunesse africaine.

Je voulais d’abord remercier cette initiative parce que je pense que c’est la 1re fois que, sans fard, il est possible de s’adresser à votre institution, puisque vous représentez l’Etat français, vous êtes le président de la République. J’en profite pour saluer le président du Ghana pour le remercier pour l’incroyable leadership qu’il implémente pour toute une génération de citoyens d’origine ou d’ascendance africaine, dont je fais partie, qui n’appartiennent pas à la génération qui pleurniche, qui se plaint, parce que ça, c’est aussi un problème.

Dès lors qu’on est africain… (Applaudissements) Merci. Dès lors qu’on est africain et qu’on essaie de décortiquer les problèmes problématiques qui nous assaillent, eh bien, on nous endigue dans la portion des pleurnicheurs, des négros paranoïaques ou alors de ceux qui ne sont jamais contents.

Donc je voulais vous remercier pour ça et vous prévenir que vous allez créer un incident diplomatique avec la France parce que je connais beaucoup de gens qui sont prêts à venir s’installer, y compris des bons Blancs, chez vous au Ghana. Donc monsieur le président, vous allez avoir des migrants français à gérer dans l’autre sens. C’est une bonne chose. Alors, je vais essayer de faire court parce que je sais que le temps est compté. Moi, j’ai.

.. Vous savez, on ne peut pas donner d’âge aux Africains et c’est la 1re fois que je m’adresse…

Si on était en Afrique, j’allais dire vous êtes mon petit frère, mais pas de trivialité entre nous. Vous êtes président de la République. J’ai plus de 4 décennies de télévision, c’est-à-dire que la nouvelle génération, le moule social, la représentativité, la vitrine d’une société passe par les médias. OK ? Et donc, j’ai voulu, avant de vous poser la question, me mettre à la place de l’enfant afro-descendant des 5 dernières décennies qui a pris « La Séquence du spectateur », Pierre Tchernia, qui a pris Denise Fabre, Garcimore, etc.

, etc. Mais qui a aussi pris « Tarzan », qui a pris « La Noiraude ». Plus récemment, qui a pris du Eric Zemmour et de Mme Angot, de M. Mariani, etc. Ce qui est légitime, puisque c’est la liberté d’expression.

Ce qui est dangereux, c’est de ne pas avoir le pendant, c’est-à-dire que, pour ces jeunes qui regardent la télévision, dont le jeune afro-caribéen, très prochainement, il va se retrouver seul de la citoyenneté française à ne pas avoir de continuité territoriale. Avec la disparition de France O, par exemple, on se retrouve avec des analyses d’injonctions contradictoires.

Alors, d’un côté, on nous dit : « Nous appartenons tous à la même citoyenneté », et de l’autre, on a des problèmes de visas. Moi-même, pour renouveler 4 décennies de carte de séjour, j’ai été criminalisé, c’est-à-dire qu’on m’a quand même fait des problèmes pour renouveler une carte de séjour, alors que je suis « l’élite de France ». Je vais faire court, j’enchaîne.

Pour vous dire que nous ne sommes pas là pour nous plaindre, La France n’a pas vocation à régler les problèmes de l’Afrique, mais il y a des gens qui vivent ici depuis 4 siècles. Gorée, Rufisque, Saint-Louis avaient des représentations parlementaires, étaient françaises, avant Lille, Nantes, etc.

Juste un dernier mot avant de poser ma question. -E. Tchoungui : OK.

Vraiment un dernier. Vraiment un dernier. -A. Mévégué : Vraiment le dernier. Parce que.

.. Non, pourquoi je fais ça ? C’est parce que j’entends déjà des gens nous dire : « Oui, mais arrêtez de vous plaindre. Vous passez votre temps à vous plaindre.

 » Je donne des faits. L’un des plus grands cinéastes du monde vient de disparaître le 2 mars 2019, un certain Med Hondo, la voix française d’Eddie Murphy pour beaucoup, mais l’un des plus grands cinéastes de la planète qui a joué et travaillé avec les Godard, avec tant d’autres, qui a donné le nom de la salle du cinéma des Cinéastes de M.

Lelouch et qui a eu très peu d’hommages, à part dire que c’était la voix d’Eddie Murphy, à la hauteur de son pedigree. Savez-vous qui nous a envoyé une lettre ? Parce que j’ai la chance d’être son fils spirituel depuis plusieurs décennies.

C’est M. Martin Scorsese. Il faut que ce soit des gens de l’extérieur qui nous magnifient, qui saluent le talent, le génie de gens qui se demandent : « Mais que faisons-nous ? Avons-nous une place ? » Alors voici ma question.

(Rires) (Applaudissements) Monsieur le président. (…) Vous avez eu la bonne idée, la bonne initiative, d’aller à la rencontre de tous les corps, de tous les corps de la composition française.

Vous avez rencontré les intellectuels. Très peu représentaient les afro-descendants. Je ne dis pas absolument, mais très peu.

Si vous demandez à l’inconscient collectif aujourd’hui qui sont les intellectuels français, ils vous diront « Kirikou » et j’exagère à peine. C’est-à-dire qu’il n’y a absolument rien sur Fanon, Césaire, on parle de Sylvester-Williams, de George Padmore, de Kwame Nkrumah, de tous ces gens-là.

Ma question est la suivante : Est-ce que… J’ai fini. 70 ans après la Libération, alors que le Général de Gaulle a été condamné à mort parce que la France était occupée, la libération.

.. J’ai fini. -E. Tchoungui : La question.

La question. 70 ans après la libération de Paris où, effectivement, il n’y avait pas de trace de la population noire, vous avez cité Sibeth Ndiaye, qui est une représentante de cette diaspora, qui malheureusement se fait injurier parce qu’elle est noire, à cause de ses cheveux.

Qu’est-ce que vous avez envie de dire à la nouvelle génération afro-descendante pour lui dire qu’elle est partie intégrante de cette société française, que c’est son pays ? Merci. -E.

Tchoungui : Merci. Madame en turban. Voilà. -Bonjour, monsieur le président de la République française. Bonjour, monsieur le président de la République ghanéenne.

Je suis Farah Clémentine Dramani-Issifou, franco-béninoise. Je suis chercheuse entre le Celsa, à Paris, et l’Université Gaston-Berger de Saint-Louis, au Sénégal, et je suis également curatrice dans les champs des arts visuels et du cinéma. Mon intervention s’adresse au président Emmanuel Macron. La France est souvent pensée, rêvée sans Noirs, alors même que les travaux de chercheurs comme ceux de l’historien Pap Ndiaye, par exemple, attestent d’une présence datant de plus de 3 siècles. Aussi, l’histoire de notre pays est marquée à la fois par une idéologie et des imaginaires encore coloniaux.

C’est aussi Pascal Blanchard qui en témoigne à travers l’exemple de la marque Banania, en disant qu’elle témoigne à la fois de ce qui n’est plus, l’image du tirailleur sénégalais, et, en même temps, elle fige de manière durable l’image de l’homme africain comme un grand enfant. Monsieur le président, alors que les nouveaux programmes de terminale font quasiment l’impasse sur l’histoire du continent africain, qu’une partie de la population française témoigne d’une grande défiance vis-à-vis de ce que certains nomment les dangers d’un décolonialisme, que la France et l’Europe deviennent de véritables forteresses, repoussant les réfugiés africains et du monde et que les projets valorisant les expressions culturelles africaines portées par des entrepreneurs de la diaspora ou non, je pense ici particulièrement aux institutions telles que le Tarmac, scène internationale francophone, aux médias Africultures, qui est en passe d’entrer dans une phase de cessation de paiement ou encore aux nombreux artistes et cinéastes qui souffrent d’un accès insuffisant aux financements et aux réseaux de diffusion.

Alors monsieur le président, comment comptez-vous faire concrètement, justement, dans les champs de la culture et de l’éducation, pour changer durablement les représentations de l’Afrique et des Afro-descendants, et surtout, comme vous le souhaitez, accélérer la transformation des relations franco-africaines ? Quel sera, du coup, le rôle accordé aux diasporas africaines dans cette entreprise ? -E.

Tchoungui : Ca fait déjà 3 questions. -F. C. Dramani-Issifou : Oui, c’est sûr. Je suis comme un bébé.

J’en profite. Je termine là. J’en ai pour une seconde. Comment faire de l’inclusion et de la diversité finalement des réalités et non pas de simples voeux pieux ? Voilà.

Et dans quelle mesure les institutions de l’Etat peuvent montrer l’exemple ? Merci beaucoup. (Applaudissements) (…

) -E. Macron : Alors vos 2 questions sont évidemment très contiguës. D’abord sur…

Pardon. Ce que vous avez dit est le message à envoyer. Je pense que le message, il ne peut se faire, et ça rejoint la question de Madame, que par l’exemple. C’est-à-dire que par la promotion de profils, de personnalités qui justement portent ces valeurs, ces visages, ces histoires.

Donc c’est pour ça d’abord que j’ai voulu m’entourer de ce conseil présidentiel pour l’Afrique, avec des femmes et des hommes qui, par leurs parcours, leurs qualités étaient à même.

.. Et que l’on affiche. Ils viennent avec moi en déplacement, ils sont des ambassadeurs sur le terrain qui vont porter cette parole. Ils font leurs déplacements propres, ils vont chercher des entrepreneurs, ils montent des initiatives.

Et ça, c’est pour moi une manière très concrète d’apporter des preuves. Ensuite, par les nominations. Quand vous êtes ici, vous avez le pouvoir de le faire sur quelques postes. C’est ce que j’ai commencé à faire et ce qu’on va poursuivre. Et donc, pour rejoindre votre question sur des choses très concrètes, je pense que dans les nominations, on s’est donné des objectifs de parité.

On doit aussi se donner des objectifs de diversité, de représentation des parcours, pas du tout sous forme…

Je fais toujours ce distinguo, comme vous l’avez vu, de discrimination positive, mais simplement parce que la République n’est pas elle-même dans son égalité et ses principes si elle met sous le boisseau des gens qui ont le même talent sous prétexte qu’ils ont une histoire différente, un profil différent, une origine différente. Et donc, moi, je considère que la manière de rebâtir ce récit et de dire que vous êtes partie intégrante de la nation, elle est d’abord dans les nominations, dans la place qu’on donne et dans les trajectoires de réussite qu’on bâtit.

Ca, c’est le 1er point. Et ça, on peut le faire. On peut le faire à l’échelle d’un quinquennat et on peut le faire quand on est aux responsabilités. Donc ça, c’est ce que je m’engage à faire. Et c’est là aussi où j’ai besoin des entreprises, qu’elles soient publiques ou privées, pour m’accompagner dans cette aventure et qu’elles prennent leur part de responsabilité en promouvant dans leurs conseils exécutifs, leurs administrateurs, pour les entreprises de l’audiovisuel, qu’elles soient publiques ou privées, des femmes et des hommes qui ont ces compétences et qui portent ces visages.

Après, vous avez tout à fait raison dans les remarques… C’était pas votre question, mais dans les remarques que vous avez posées, je pense qu’on a un problème aujourd’hui dans le débat public. C’est qu’on a une surreprésentation des dénonciations, en quelque sorte, d’une perte de l’identité française.

Moi, j’entends ce débat. C’est un débat que j’ai toujours affronté. J’aime le terme de personnalité française et j’ai toujours défendu l’idée et le fait que la France est avant tout un projet qui repose sur un peuple, une culture qui lui est propre, mais qui a toujours eu un rapport à l’universel géographique et de valeurs qui est très particulier.

Je ne crois pas que la France n’ait jamais eu une identité refermée. Mais ce qui est vrai, c’est quand il y a une surreprésentation de celles et ceux qui portent ce discours, et, si je reprends et je reformule ce que vous avez dit, une sous-représentation de celles et ceux qui peuvent représenter une autre histoire de ce qu’est la France, on a un problème.

Et on en est là.

Et donc, je pense qu’il est de la responsabilité, là, pour le coup, de celles et ceux qui sont en charge. C’est pas le président de la République qui est en charge des grilles. Et sincèrement, je pense que ce n’est pas une bonne politique que ce soit le président de la République qui se mette à dire : « Il faut qu’un tel ou un tel devienne présentateur de ceci ou de cela. » Parfois, on a essayé, on a eu des problèmes, comme dirait l’autre.

Donc moi, je ne vais pas m’aventurer là-dedans. Je dis juste qu’il y a des sociétés de rédacteurs, il y a des responsables de l’audiovisuel public et privé. Je pense qu’ils doivent aujourd’hui s’approprier pleinement cette question et la porter. Mais il est clair qu’aujourd’hui, elle pose une question de nature politique et de capacité de tous nos concitoyens à se sentir représentés. Moi, je continuerai à le faire aussi dans la part politique.

Vous avez plusieurs parlementaires qui ont de telles trajectoires et qui sont des parlementaires du mouvement politique que j’ai porté.

J’en reconnais les visages et je les remercie d’être là. Ils ont des histoires très différentes, du Rwanda, aux Comores, en passant par Madagascar ou le Burkina. J’en ai vu quelques-uns. Jamais des mouvements politiques n’avaient porté autant, pour la France hexagonale.

.. Il y a aussi des parlementaires ultramarins qui sont présents dans cette salle. Mais pour la France hexagonale, cette force et cette différence de trajectoire. Et moi, je suis très, très heureux d’avoir un élu breton qui vient du Rwanda, d’avoir une élue du Lot qui vient du Burkina Faso.

Je veux dire, quand le mouvement que je représente a investi une jeune femme qui travaillait dans une entreprise et qui venait du Burkina Faso, je peux vous dire, moi, j’ai très bien entendu ce que certains m’ont dit sur place : « Vous n’avez vraiment pas envie de gagner, vous. » (Rires) Elle a été élue députée. Mais c’est ça, la réalité. Donc je veux dire, par l’exemple, on peut faire des choses.

Donc au-delà du discours que je porte, de ce qu’on fait là, aujourd’hui, c’est par la preuve et par l’exemple et par la part de vérité que portent aujourd’hui ces parlementaires, celles et ceux qui ont des fonctions gouvernementales, celles et ceux qui ont des fonctions administratives ou dans l’entreprise.

.. Ca, on peut le changer. Et c’est de montrer que c’est une part intégrante, parce que c’est une part de vérité. Et les jeunes leaders qui font partie du programme, qui sont poussés par nos universités, nos entreprises, c’est aussi une partie de ça.

Ensuite, sur la culture, vous avez eu raison, c’est le deuxième point que vous avez relevé. Je sais toutes les difficultés qu’il y a eu, qui sont aussi très particulières. Je ne vais pas revenir sur ce qui s’est passé sur le Tarmac, où la ministre de la Culture Françoise Nyssen s’était beaucoup battue, mais qui avait des difficultés propres. Et je pense qu’il ne faut pas le voir comme un symbole, en l’espèce, d’une non volonté de faire, au contraire.

Moi, je crois beaucoup, en effet, à la culture.

Et ce qu’on fait avec Africa 2020 et la Saison, c’est ça. Et c’est exactement dans la lignée de ce que vous présentez, c’est-à-dire, je vais mettre les pieds dans le plat, parce que je sais aussi ce que certains voudraient faire ou ce que certains craignent, ce n’est pas l’exposition coloniale, ce qu’on veut faire, qu’on soit clairs tout de suite. C’est N’Goné Fall qui pilote la chose, et je la remercie de son courage, parce que je sais toutes les difficultés qu’elle rencontre par ailleurs, et donc on va tout faire pour l’aider et mettre les bouchées doubles. Et derrière ça, c’est véritablement la volonté de donner une place aux artistes africains binationaux quelle que soit, d’ailleurs, la discipline, et de leur donner la possibilité non seulement de choisir, de faire, mais de montrer leur part de vérité, d’en faire la scénographie, d’en faire le choix éditorial et, en quelque sorte, d’en faire très profondément le choix de regard.

Et c’est ça qui change, pour moi, tout.

Ce ne sont pas des conservateurs hexagonaux, français, qui vont dire ceci est bon, ceci n’est pas bon, même si on a des conservateurs qui sont passionnés d’Afrique. Mais je pense que dans cette conversion que j’évoque, ce changement est aussi important. Et c’est aussi la volonté de montrer la vitalité et la vibration de toutes les scènes africaines. Et c’est aussi pour ça qu’on fera venir des artistes binationaux, mais des artistes de toute l’Afrique. Il y aura de l’art contemporain, il y aura du spectacle vivant, et donc il y aura la véritable volonté aussi de permettre à des artistes qui sont en France parfois depuis plusieurs années de pouvoir ainsi se produire et prendre leur place, et à des artistes africains d’être connus en France et de montrer aussi ce regard, mais que ce regard soit choisi et porté.

Et donc, dans ce contexte-là, la diaspora aura un rôle absolument essentiel à jouer. Mais pas un rôle de spectateur, un rôle d’acteur, très profond. Et c’est aussi pour ça que les entreprises qui portent ce projet sont certaines grandes entreprises françaises, qui sont présentes dans cette salle, et qui sont liées à l’Afrique, avec un Comité des mécènes qui est piloté par Stéphane Richard, que j’évoquais tout à l’heure, et des entreprises de tous les secteurs qui en font partie, mais avec aussi des mécènes africains. Ce qui est une première. On l’avait jamais fait.

Par exemple, quelqu’un comme M. Dangote, que je remercie… On parlait du Nigeria tout à l’heure, c’est un grand mécène nigérian.

Mais il n’avait jamais financé de grandes actions culturelles ainsi en France. Et il le fait parce que je veux aussi que ceux qui portent la réussite en Afrique et ses exemples soient mieux connus de la part des jeunes français, des jeunes binationaux et puissent continuer à faire.

Et on continue ce travail qui avait été commencé, vous parliez de la relation franco-béninoise, par Lionel Zinsou que j’aperçois, là, et que je remercie, parce que ce que je suis en train de dire, lui, il le fait avec beaucoup d’engagement et de discrétion depuis…

Vous pouvez l’applaudir. (Applaudissements) Depuis des décennies avec cette même volonté de promouvoir des talents et de le faire avec une liberté assumée et un respect mutuel. Donc voilà, sur le plan culturel, ce qu’on va faire. Sur le plan éducatif, là aussi, ce à quoi je crois très profondément, et vous l’avez évoqué, c’est ce partenariat équilibré. Vous avez raison, on doit aller beaucoup plus loin sur les programmes.

Je le disais moi-même tout à l’heure. Le constat que vous faites, il est vrai. Donc ça, il faut qu’on arrive à le corriger, à le réparer et qu’on arrive aussi à faire qu’un parent d’élève ne puisse pas dire à son enfant que l’Afrique, c’est nul, parce qu’il n’y connaît rien.

Et donc, qu’il puisse y avoir cette ouverture qui soit faite. Mais ce que je veux qu’on fasse par l’éducation, c’est là aussi par un vrai partenariat avec les pays africains.

C’est-à-dire la possibilité, on y reviendra peut-être si on parle des étudiants, et je ne veux pas être trop long pour qu’on puisse avoir d’autres questions… C’est véritablement de pouvoir développer l’éducation dans et avec les pays africains, en français comme d’ailleurs dans d’autres langues.

C’est ce qu’on fait et ce qu’on a décidé de lancer avec le Ghana.

C’est ce qu’on fait dans la région du Sénégal et de la Côte d’Ivoire et ce qu’on va poursuivre pour permettre aussi d’avoir des parcours croisés et des mobilités choisies des étudiants entre nos deux pays. Voilà quelques exemples. Mais moi, je crois profondément à cette conversion du regard, mais ça ne passe pas simplement par un nouveau narratif, ça passe par la preuve, par les nominations, les choix qu’on fait, le caractère assumé et conquérant que cette nouvelle génération doit avoir, et nous, la part d’obligation qu’on met et les preuves qu’on apporte dans les prochains mois à travers les différentes initiatives que je viens de citer. -E. Tchoungui : Merci beaucoup d’avoir consacré ce temps à cette question du changement de perception.

Je repense notamment à un titre, je crois, qui a un peu froissé certains dans la salle, un titre d’un grand média : « L’Elysée invite les diasporas à la palabre. » Et voilà. On a cherché les baobabs, les tam-tams, ils ne sont pas là. Je suis obligée de refermer ce chapitre, car nous devons avancer sur d’autres terrains. Vous venez de parler des étudiants.

Et les étudiants, il y a un gros sujet de préoccupation. Promis, après, je vous donne la parole. Sur les étudiants, qui veut…

? Madame, alors… Oui, je retournerai à gauche, promis.

Sur les étudiants, je vois Madame qui souhaite poser une question. Et puis Madame en rose. Donc d’abord, Madame, ici. Et ensuite, Madame en rose. Voilà.

Et après, promis, je m’occupe de la gauche. Alors… -Messieurs les présidents, je me présente, Hélène Velasco-Graciet, je suis présidente de l’Université Bordeaux Montaigne.

Et je voudrais témoigner justement d’une université de province spécialisée dans les sciences humaines et sociales. Donc vous savez une politique « Bienvenue en France » a été mise en oeuvre et elle a impliqué l’augmentation des droits d’inscription des étudiants extracommunautaires.

Cela s’est traduit dans mon établissement, qui est un établissement qui a d’anciennes relations avec les universités africaines, par une diminution, au moins cette année, du nombre d’étudiants, notamment d’étudiants africains. Donc à l’heure, finalement, où nous relançons, le plus que nous pouvons et avec beaucoup d’enthousiasme, les relations avec les universités africaines, des relations, finalement, qui sont anciennes et qui ont toujours été fondées sur une confiance intellectuelle, mais aussi fraternelle, à votre avis, messieurs les présidents, n’y a-t-il pas une contradiction, un paradoxe, et peut-être un risque ? -E.

Tchoungui : Merci. Une deuxième question. Merci d’être très synthétiques, y compris messieurs les présidents, dans votre réponse pour que nous puissions donner la parole à la gauche.

Donc Madame. La gauche géographique, j’entends.

(Rires) -Bonjour, monsieur le président de la République française et monsieur le président de la République du Ghana. Je suis Anna Tjé, artiste-chercheuse française, d’origine camerounaise. Je ne suis pas binationale, parce que ça n’existe pas. Pour le Cameroun, on choisit une nationalité. Mais je suis doctorante à la Sorbonne Nouvelle Paris 3 et co-fondatrice de la revue littéraire et artistique « Ataye ».

Ma question fait suite à la question posée par ma voisine, et puis aussi au sujet des étudiants. Moi, je parle d’abord en tant qu’artiste autodidacte et aussi en tant que doctorante qui évolue principalement dans les champs de la culture et de l’université. Vous avez répondu, je pense, précédemment à la manière dont les artistes de la diaspora allaient être présents dans Africa 2020.

Moi, je me pose la question de la manière dont Africa 2020 va impulser autre chose et une pérennité pour la présence des artistes et des penseurs dans ce contexte-là. Ils sont trop souvent invisibilisés en France, ils ont une situation économique précaire.

-E. Tchoungui : Votre question ? -A. Tjé : Donc moi, du coup, ma question, pour faire très simple, même si je pense que c’est important d’apporter du contexte, mais il y a beaucoup de personnes qui veulent parler..

. Je souhaiterais savoir à quand un centre culturel et éducatif des Afriques en France ? Voilà. Pour que tous les artistes de la diaspora puissent avoir leur place, que ce soit un centre également qui puisse permettre à des personnes d’ascendance africaine d’avoir des postes importants, donc de direction et aussi employés dans ce type de structure. Et je souhaite aussi savoir quels types de propositions pouvez-vous faire pour des bourses de recherches, de créations, de mobilités, pour les personnes de la diaspora africaine principalement.

Merci. (Applaudissements) -E. Macron : Vous avez raison sur le…

Votre question, madame, sur les étudiants et les frais d’inscription. D’abord, c’est un sujet dont on a beaucoup parlé. Je veux redonner les faits et les chiffres, expliquer où on en est et ou on va. Des grands pays d’attraction, de coopération avec l’Afrique, la Belgique, le Canada, les Etats-Unis, font payer des frais aux étudiants 10 à 15 fois supérieurs à ce qu’on fait payer, même après la réforme. Jusqu’à présent on disait : « Les études en France, c’est gratuit pour tout le monde.

 » C’est pas vrai.

Ca a un coût. Le coût, c’est le contribuable français qui le paye. Et donc je considère et j’assume totalement de dire qu’il est normal de faire payer pour les étudiants extracommunautaires un montant qui est modique et qui reste, comme je viens de le dire, extraordinairement inférieur à beaucoup de nos comparables et aux autres grands pays qui ont la même politique d’attractivité. Et on ne paye en réel que 30 % du coût réel de cette scolarité.

Donc on ne crée pas des universités américaines où on demande à un étudiant africain de pays 100 % du coût de sa scolarité. Les 70 % restants de tous les étudiants non communautaires, c’est le contribuable français qui les paye.

Donc soyons clairs. En parallèle de ça, on a rouvert plus de places de bourses et d’exonérations. Moi, je regarde les chiffres.

Alors pour votre université, je les ai pris. Je peux vous donner les chiffres nationaux. Hausse de 7 % pour l’ensemble du monde, Afrique comprise, sur les inscriptions en licence 1. Pour les autres niveaux, on a un nombre de candidatures qui baisse de 10 %, mais le nombre final d’étudiants sélectionnés sera le même. Parce que, à côté de ça, nous avons 10 000 étudiants boursiers, à qui on paye tout, dont 2 500 Africains, et 14 000 étudiants supplémentaires, dont 6 000 Africains qui feront l’objet d’exonération.

Donc il y a eu beaucoup de polémiques qui ont été lancées, bien souvent pour des raisons politiques, en France, mais la réalité n’est pas parfois celle qu’on a décrite. Je voulais juste ici remettre, si je puis dire, les pendules à l’heure. Après, la réalité des choses. On ne peut pas dire que notre politique pour la jeunesse africaine, c’est de lui dire : « Viens étudier en France, c’est super. » Or c’est ce qu’on fait depuis des décennies.

Pour la première fois depuis 2 ans, on lance des vrais programmes d’installations d’universités dans des pays africains. On ne le faisait pas jusqu’alors. Moi, je suis désolé, je suis infiniment plus fier d’ouvrir pour la première fois des sites d’éducation supérieure au Sénégal, en Côte d’ivoire, comme on est en train de le faire, qu’aller expliquer à tous les Sénégalais ou aux Ivoiriens : « Tu veux réussir et faire une licence ? Viens à Bordeaux ou Paris. » Parce que c’est pas possible.

C’était ça, le mirage dans lequel on vivait. Donc il faut garder les programmes qu’on a, les bourses, il faut sortir d’une hypocrisie dans laquelle on était qui était de dire : « L’enseignement supérieur, ça coûte rien. » Il faut avoir une vraie politique de co-développement universitaire avec les pays africains et monter des universités en Afrique.

Et hier, j’ai réuni, grâce à l’initiative de certains, plusieurs universités du monde entier. Il y a une quarantaine d’universités qui étaient là.

Il y avait l’Université d’Ibadan, au Nigeria, du Cap, en Afrique du Sud, et ils ont envie de ça. Et on doit aller beaucoup plus loin, beaucoup plus fort. Donc voilà la politique que la France va mener sur l’enseignement supérieur. C’est de faire beaucoup plus d’initiatives comme ça et de choisir justement cette mobilité. Et moi, je pense qu’il faut plutôt avoir des étudiants africains qui viennent en master ou en doctorat, mais à qui on permet au maximum de faire la licence dans leur pays.

Sinon, on continuera à avoir le « brain drain » qu’évoquait le président. Sinon, on dit aux gens : « C’est super, les études supérieures, mais ça marche pas dans ton pays, ça n’existe pas. » Voilà.

En tout cas, je voulais donner les chiffres pour la France. Pour ce qui est Africa, moi, je ne suis pas contre votre idée.

On va regarder. J’entends votre idée de centre culturel. Je préfère que les gens donnent leur avis et puis on va vraiment le préparer. Moi, j’adore pas l’idée, à titre personnel, je vais vous dire pourquoi. Parce que je trouve que ça confine un peu, d’abord, comme s’il y avait des cultures africaines qui auraient besoin d’un centre et qui seraient dans un coin.

J’adore pas cette idée-là. Je préfère l’idée qui consiste à dire : « Les artistes africains ont leur place dans tous les lieux « et c’est à nous, justement, de l’intégrer dans la programmation de tous les sites culturels. » Vous avez là deux grands dirigeants d’établissements culturels, si je puis dire, du quartier, mais du centre de Paris. Chris Dercon, il dirige la maison d’en face. Pendant la Saison Africa 2020, eh bien, il y aura des artistes contemporains qui seront exposés en face, dans un lieu où on met d’habitude les impressionnistes ailleurs.

Je trouve que c’est mieux que d’avoir un lieu qu’on aura trouvé dans tel quartier pour dire : « C’est là qu’on va mettre les cultures africaines. » Et donc, c’est ça qu’il faut continuer à faire. C’est ça qu’il faut continuer à faire.

De la même manière, Stéphane Martin est là. Il a fait, lui, déjà beaucoup, à la fois pour les cultures contemporaines comme pour nos liens historiques, avec tous les continents.

Et il continue à le faire aussi en matière de recherche. Et on continuera ce travail. Donc voilà. Je préfère qu’on soit beaucoup plus volontaristes, qu’on dise : « Il nous faut des conservateurs et conservatrices « qui sont binationaux, il nous faut des artistes qui sont de la diaspora ou qui sont..

. » Voilà. C’est plus cette politique que je veux favoriser que l’idée de dire : « On crée, en quelque sorte, de nouveaux centres dédiés à 100 %. » Mais on va regarder.

Promis.

-E. Tchoungui : Merci beaucoup. Alors je vais être très concrète. Il reste 5 petites minutes. Donc la moitié de la salle va me détester et j’assume.

Je voudrais juste terminer sur la question monétaire comme outil de croissance en Afrique, monsieur le président Akufo-Addo. Quid de cette monnaie unique dans la région Cédéao ? On en est où ? On parlait d’horizon 2020, est-ce que ça pourra être respecté ? -N.

Akufo-Addo : This is one of the important… -Ceci est l’une des questions qui nous attendent et qui sont vraiment très importantes pour l’Afrique de l’Ouest. On est un pays de 30 millions d’habitants et nous sommes au centre d’une région qui a 350 millions d’habitants.

Et évidemment, pour organiser des échanges économiques et commerciaux au sein de 350 millions d’habitants, eh bien, c’est merveilleux, parce que ça a un potentiel bien meilleur, bien supérieur pour le progrès.

Si on regarde le projet européen, c’est un exemple des temps modernes par rapport à ce que je raconte. Oui, il y a des défis, des difficultés dans ce projet. Mais je pense que c’est un modèle que l’on doit suivre. Le développement de l’Europe au cours des 40 dernières années, eh bien, a eu un impact énorme sur le niveau de vie des Européens.

Alors l’un des piliers essentiels de ce projet a été la monnaie unique. Et c’est d’ailleurs de cela qu’on a tiré notre analyse. Si nous sommes à même d’avoir ce marché, avec des règles communes de fonctionnement sur le marché, et qu’il soit soutenu et étayé par une monnaie unique, eh bien, cela sera positif.

Nous appartenons à une partie du monde qui a le pourcentage d’échange avec l’étranger le plus faible. Et le chiffre en Europe, c’est 60 %, pour le commerce avec l’étranger.

60 % du PIB. Et 70 % correspondent aux échanges au sein de l’Union européenne. En Afrique, eh bien, c’est 15 %. Alors, en Europe, si l’Europe a pu augmenter les échanges commerciaux et économiques entre eux, eh bien, je pense que cela pourrait être fait de même en Afrique et augmenter le niveau de vie de nos peuples. Et pour cela, eh bien, le bon moyen, c’est d’avoir une monnaie unique.

Alors il y a des mesures qui doivent être prises pour cela. Il faut déjà définir la monnaie. On l’a fait, on l’a même appelée « l’éco ». On a pu définir le modèle au niveau de la Banque centrale, qui va superviser ces opérations en éco. Nous avons même donné une date.

Nous avons été même jusqu’à à établir des critères qui régiraient le fonctionnement des échanges.

Donc nous avons établi les règles du jeu, disons. Et puis, à mon avis, eh bien, même à la date que nous avons choisie, pas tous les 15 membres de l’Ecowas seront prêts pour ce changement. Et ceux qui sont prêts pourront commencer. Et je pense à 2 ou 3 pays, en Afrique de l’Ouest, qui, d’ici 2020, seront prêts à commencer et pourraient créer une situation, pourraient être ensuite rejoints par d’autres qui ont les critères de convergence.

Alors oui, le Ghana pense qu’il est essentiel que nous ayons cette monnaie unique. Deuxièmement, nous reconnaissons la possibilité d’une intégration progressive dans cette union. Et puis 8 des 15 pays d’Afrique de l’Ouest appartiennent à la zone franche du franc CFA.

Et, clairement, il faudra qu’il y ait quelques transformations dans l’arrangement monétaire de ces pays. Et en ce qui concerne la monnaie unique, eh bien, ce qui a été très utile pour nos débats sur cette question, c’est la déclaration du président Macron en 2017, parce que les gens pensaient que la France voulait s’accrocher finalement à la zone franche CFA.

En fait, non. La France a bien dit qu’elle laissait la décision et le choix de choisir soit la zone CFA, soit une autre monnaie.

Donc je pense que c’est important que nous comprenions bien qu’il faut vraiment, eh bien, avoir le choix. Pour le moment, les 4 personnes qui sont les responsables de ces débats au sein de la Cédéao, eh bien, ont défini une feuille de route. 2 sont anglophones, 2 sont francophones.

Alors, le Ghana, le Nigeria. Et pour les francophones, la Côte d’Ivoire et le Niger. Et il y a, de plus en plus, un point de vue commun qui apparaît sur la nécessité, pour nous, d’avoir cette monnaie unique et puis pour la validité, l’importance pour tous les membres de la communauté.

Donc moi, je suis optimiste. Je pense que très bientôt, cette nouvelle monnaie va se mettre en place.

Et je pense qu’il y aura, de ce fait, un élan supplémentaire que cela va apporter dans les investissements et l’économie des pays qui l’ont choisie. Les gens s’accrocheront, continueront à s’accrocher au CFA. Il y a eu des gens aussi qui voulaient absolument…

Certains voulaient absolument s’accrocher au deutsche mark. Mais moi, je pense que l’on pourra avoir la monnaie éco pour les pays qui le veulent. -E. Tchoungui : Merci beaucoup. Vous avez tendu la perche au président Macron sur la question du franc CFA, d’un côté jugé monnaie coloniale, de l’autre côté, garantie contre la machine à billets.

Peut-être un mot là-dessus ? Et puis votre mot de conclusion. -E. Macron : Vous ne voulez pas donner la parole..

.? -E. Tchoungui : Si vous avez du temps, oui. -E.

Macron : Prenez juste 2 questions, sinon vous allez avoir une émeute à gauche. Et je réponds à ça en même temps. -E. Tchoungui : Mesdames à gauche, là. Si l’hôtesse peut.

..

Voilà. -E. Macron : le président doit filer après, mais on prend 2 dernières questions, parce que sinon, on aurait été.

.. -Bonjour à tous. -E. Tchoungui : Des questions très rapides.

Très, très rapides. -Bonjour. Merci beaucoup. Enfin. Merci.

Bonjour, monsieur le président de la République. Bonjour, monsieur le président du Ghana. Je m’appelle Uché Pézard. Je dirige une entreprise, un cabinet de conseils spécialisé dans le développement du luxe au niveau international. Je suis également la fondatrice de Luxury Connect Africa, qui investit dans les marques de luxe fondées par des Africains et des Afro-descendants, pour le développement à l’international.

J’ai 2 questions. Je vais parler en anglais. Parce que je suis nigériane. Excusez-moi. Ma première question, c’est pour vous, président Akufo-Addo.

You have a very clear vision for Africa’s diaspora… -Vous avez une vision assez claire pour la diaspora dans le monde et vous avez aussi parlé de l’année du retour.

Vous avez aussi signé un système de visas.

Les Jamaïcains n’ont pas besoin de visa pour aller au Ghana. Mais il y a plus de 200 millions de personnes qui ont une descendance africaine, donc beaucoup plus que la diaspora chinoise. Et les descendants d’Africains ont le potentiel d’avoir une contribution considérable, qui se chiffre en milliards, pour l’Afrique. Pourquoi est-ce que le Ghana est le seul pays en Afrique qui s’engage avec la diaspora africaine à des fins de transformation économique et culturelle ? Et qu’est-ce que vous pouvez faire pour encourager les autres pays africains à suivre cet exemple, en particulier, les pays francophones ?

Ma deuxième question est pour le président Macron. -E. Tchoungui : Vous avez pris la question de votre voisine. On avait dit 2 dernières questions. Le président lui-même.

-U. Pézard : I’m Nigerian. My husband is French…

-Donc je suis nigériane, mon mari est français.

Je vis à Paris et nous sommes mariés depuis suffisamment d’années pour que mon mari puisse avoir un passeport nigérian. Il est très heureux et il a décidé d’adopter aussi un enfant nigérian. Et il n’a jamais eu besoin de mettre en cause sa citoyenneté française. Et personne ne l’appellera « franco-nigérian ».

En fait, il sera simplement un Français qui a la nationalité nigériane. -Quelle est votre question ? -Donc ma question est la suivante : dans ce cadre de crise de l’identité, eh bien, nous, Africains de la diaspora, nous n’avons pas la possibilité d’avoir nos doubles identités. Est-ce que le gouvernement peut faire quelque chose pour faire en sorte que nous puissions réellement parler de cette double identité, et notamment dans le programme Africa 2020 ? -E.

Tchoungui : On n’a plus le temps. Sauf si le président le décide.

Le président ghanéen doit partir. Merci pour votre enthousiasme. Nous avons bien noté que le président Macron a dit que ce n’était que le début, ce rendez-vous.

Donc vos réponses et votre conclusion, s’il vous plaît. -E. Macron : On doit avoir de la discipline, d’autant que…

C’est un échantillon de grand débat que je voulais offrir au président ghanéen. Maintenant, il comprendra que la prochaine fois, il faut rester. (Applaudissements) Il faut prévoir 7 ou 8 heures. Non, mais, on aura d’autres rendez-vous. Et je suis prêt d’ailleurs à y rester plus longtemps.

Je vous promets. Y compris sur des sujets qui vous paraissent importants. Là, on doit avoir une discipline de temps, c’est absolument essentiel. Je vais laisser peut-être le président dire un mot sur cette question. Je répondrai à la question et au point sur le franc CFA.

-N. Akufo-Addo : So, I’ll use the opportunity… -Je vais profiter de cette occasion également pour vous faire part de ma conclusion.

Je suis très prudent. Je suis l’un des plus jeunes présidents du continent, non pas en âge, mais en termes de durée de mandant. Je suis, en conséquence, extrêmement attentif. Il ne m’appartient pas de dire aux uns et aux autres ce qu’ils doivent faire ou non. Là, il s’agit de la trajectoire du Ghana.

Si d’autres la trouvent séduisante, tant mieux, sinon, tant pis, nous continuerons. Nous continuerons sur notre chemin. Pour conclure, il y a une chose que je souhaitais dire à mes frères, à mes soeurs de la diaspora africaine ici présents. Parfois, lorsque j’entends toutes les préoccupations sur le statut des uns et des autres, les barrières en France, il y a néanmoins une chose qu’il vous faut garder à l’esprit et j’espère que vous associerez ce propos à moi-même.

Le destin de toutes les personnes noires, où qu’elles se trouvent dans le monde, leur destin est lié à l’Afrique.

Je le répète, le destin de toutes les personnes noires, où qu’elles se trouvent dans le monde, est lié à l’Afrique. Il s’agit d’une Afrique qui réussit, élève le statut de tous les citoyens du monde d’origine africaine et améliore la façon dont vous êtes perçus, dont on vous regarde.

Je prends un exemple très simple pour vous expliquer ce que je veux dire par là. Il y a quelques années, 30, 35 ans, il y avait une grande université américaine qui proposait des cours en mandarin. Durant les premières années, le cours était proposé, mais aucun inscrit.

Cela n’intéressait personne. Et de fait, au sein de la communauté universitaire, nombreux étaient ceux qui voulaient mettre un terme à ce programme afin que les ressources allouées pour cet enseignement du mandarin puissent être réutilisées. Mais malgré tout, ils ont continué, ils ont persévéré à proposer ce cours. Aujourd’hui, ce cours est celui sur lequel il y a la plus grande liste d’attente à l’université et rien n’a changé. Ce n’est pas plus simple que par le passé d’apprendre le mandarin.

Les programmes proposés n’ont pas changé, mais une chose a changé, c’est la position et le statut de la Chine. Chacun reconnaît maintenant qu’il faut traiter avec la Chine. Donc ils se précipitent pour s’inscrire à ce cours de mandarin.

Et ce que je vous dis, c’est : lorsque le statut de l’Afrique aura changé, c’est votre situation qui changera également en France. Merci.

Merci. Merci beaucoup. Et je suis désolé. Pardon..

. d’avoir à partir. Je ne peux rester plus longtemps. Il faut que je poursuive ma route. Merci beaucoup, je vous remercie vivement pour l’accueil et pour l’invitation à participer dans ce forum.

Ca m’a beaucoup appris. Et je suis très reconnaissant de ce que vous avez fait pour ça. Merci beaucoup. -E. Macron : Merci, président.

(Applaudissements) -Je voulais… Sur..

. Je vais répondre par courtoisie sur la zone CFA. Parce que le président a eu l’amitié de citer le discours de Ouagadougou. Pour dire très clairement, moi, je suis attaché à une chose, à ce qu’il y ait un succès pour l’intégration régionale Cédéao, donc la zone dite « Ecowas ».

Et donc ça veut dire qu’il n’y a pas de tabous.

Et donc, le franc CFA, il a existé, il existe. Il y a une utilité, mais il ne faut pas qu’il y ait de tabous. Donc c’est un sujet qu’on doit pouvoir ouvrir et qu’on a décidé d’ouvrir ensemble avec nos partenaires africains, de manière apaisée, sans culte du symbole et sans, si je puis dire, ni tabous ni totems. Et donc on fera tout ce qui est utile. On doit garder la part de stabilité que ça apporte, mais on doit permettre à toute la région de s’intégrer pleinement dans un espace monétaire intégré, comme l’a dit le président du Ghana à l’instant.

Ca, c’est le premier point. Le deuxième, et je finirai là-dessus, c’est en référence avec votre question.

Je sais qu’il y a beaucoup de frustration, donc on poursuivra ce dialogue. Rassurez-vous. Et ne me reprochez pas de devoir l’interrompre pour raccompagner notre ami.

Parce que, comme vous l’avez dit, c’est aussi la première fois qu’on a un tel dialogue. Et je pense que c’était important. Mais il y a d’autres étapes devant nous. La première, c’est la Saison Africa 2020, dont on a parlé, où vous allez avoir un rôle essentiel. La deuxième, c’est le sommet Afrique-France, qui aura lieu à Bordeaux du 4 à 6 juin 2020 et qui sera, là aussi, un sommet profondément innovant dans la manière qu’on a de le faire.

La troisième, c’est dans les pratiques qui sont les nôtres au quotidien. En France, comme à l’étranger, tout ce qu’on s’est dit aujourd’hui, ce sont des actions qu’on doit prendre. Et c’est ce qu’on continuera à faire aussi comme on a commencé à le faire avec la secrétaire générale de l’OIF, que je remercie pour sa présence.

Très sincèrement, chère Louise, merci aussi parce que vous portez un visage de cette Afrique qu’on pense anglophone, mais qui est pour moitié francophone, qui est le Rwanda, et dont vous portez aussi l’ambition linguistique partout sur le continent. Merci d’avoir été avec nous.

(Applaudissements) Et donc, mes amis, pour finir ce pivot vers l’Afrique auquel je crois, c’est aussi celui sur lequel je veux vous engager. Ce qu’a dit le président est très important. La réussite du continent africain, ce sera aussi la vôtre et elle changera le regard, la vie de tous les binationaux, de toutes les Françaises et tous les Français d’origine africaine et tous les Africains vivant à travers le monde.

Mais je sais aussi une chose, c’est que la capacité de la France à changer son action, son regard sur l’Afrique, elle passe par vous. Votre implication, votre capacité à nous aider à le faire, à convaincre toutes les Françaises et tous les Français du fait que c’est indispensable, mais aussi à convaincre dans notre pays, en expliquant combien c’est important, parce que l’Afrique fait partie non seulement de l’histoire de la France, mais de la France d’aujourd’hui.

Parce que la géographie est ainsi faite, mais parce que notre peuple est ainsi fait.

Et parce qu’on ne peut pas être fier de la diaspora quand ils réussissent au rugby, au foot, dans je ne sais quelle discipline, au cinéma ou ailleurs, et considérer que c’est une menace ou quelque chose de lointain quand on en parle plus largement. Et donc je pense que cette réussite, c’est une part du destin partagé. Le destin français se joue dans et par l’Afrique aussi. Et il se joue dans et par la réussite de ces diasporas et de votre présence aujourd’hui.

Et cette avant-garde que vous êtes, j’en ai besoin pour réussir.

Réussir ce qu’on veut faire en Afrique, mais réussir ce qu’on veut faire pour nous-mêmes. Et donc, je compte sur vous. C’est pour ça aussi, croyez-le, qu’on se reverra. -E.

Tchoungui : Merci beaucoup, messieurs les présidents. Je vais vous demander de rester. -E. Macron : Merci au président d’avoir pris 2 heures de son temps pour être avec nous. -E.

Tchoungui : Merci beaucoup. Merci. Je vais laisser le président Macron raccompagner son homologue. Je vais vous demander de rester assis pendant ce temps. Merci infiniment.

.

Read More: La France est-elle en train de perdre l’Afrique ? – Ces idées qui gouvernent le monde

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